PRINTEMPS DES POÈTES 2009   -  En rires
textes en français et création poétique
MATERNELLE, CYCLE 2, CYCLE 3, COLLÈGE, LYCÉE

⥣⥣ RETOUR à la page d’ACCUEILBienvenue.html
 

PRINTEMPS DES POÈTES 2009 - L’HUMOUR - textes en français avec suggestions de CRÉATION POÉTIQUE

par auteurs  M  -  N  -  O

les textes accompagnés de fiches de création poétique sont indiqués par [+ CRÉATION]


TEXTES D’AUTEURS  M  N  O


Gabriel Macé (Jean de la Futaille) : L'automobiliste qui avait fait une simple erreur / Sur la vanité des choses de ce monde / À chacun ses raisons / Le Tiercé

Jean-Hugues Malineau : Le ragondin / Le perroquet

Stéphane Mallarmé : Poèmes-adresses [+ CRÉATION poétique et ARTS PLASTIQUES]

Pierre Menanteau : Ah ! que la Terre est belle / Au gui l'an neuf / Grillon

Henri Michaux : Le grand combat / Mes occupations

Michel Monnereau : Un soir ...

Jean-Luc Moreau : Locataires [+ CRÉATION] / La cour de mon école / Le cerf-volant / La télévision / Chanson de l'heure qu'il est / Trois petits pantins / Si... [+ CRÉATION POÉTIQUE] / L'oncle Octave / Quand le chat [+ CRÉATION] / L'éléphant rose et la souris blanche / L'hippopotame / Le renard et le corbeau

Guy de la Mothe : proverbes travestis (voir LUC DECAUNES)

Carl Norac : Étoile ou étincelle (acrostiche) / Poème du cartable rêveur

Géo Norge : Zoziaux / Monsieur / Oubli / Totaux / La Faune / On peut se tromper / Chant du merle / Si...si

René de Obaldia : Dimanche [+ CRÉATION] / Moi j'irai dans la lune / J'ai trempé mon doigt dans la confiture / Chez moi / Le plus beau vers de la langue française / Manège

- Gabriel Macé -

Gabriel Macé (1918-1990) a signé sous le pseudonyme de Jean de la Futaille, clin d'oeil à qui-vous-savez, des textes en forme de fables dans Le Canard Enchaîné dont il a été rédacteur en chef.



Ces scènes animales ou humaines, publication satirique oblige, font souvent référence à l'actualité sociale et politique du moment (avec plus de liberté, mais à l'image de la critique indirecte de la Cour du roi Louis XIV par Jean de La Fontaine dans ses fables). Elles ont parfois une plus large portée.

Dans Le Canard de Poche où elles ont été publiées, le nom de l'auteur, Gabriel Macé, n'apparaît que comme préfacier et commentateur !

L'humour noir de Gabriel Macé :

Sur la vanité des choses de ce monde

L'était dalleur de son métier,
Mais l'avait trop la dalle en pente.
L'en est claqué dans sa soupente.
Que reste, maintenant du dalleur-ardoisier
Qu'a décroché la tombale ?
Que dalle.

Jean de la Futaille (Gabriel Macé - Les Fables de Jean de la Futaille - Numéro spécial du Canard Enchaîné, nov 1967)

et trois fables, tirées du chapitre "Fables pour enfants tombés sur la tête", dans ce même livre :

L'automobiliste qui avait fait une simple erreur...

C'était incompréhensible
Pour l'agent verbalisateur :
L'Automobiliste irascible,
Prenant le rouge pour cible,
Fonçait, cornant avec fureur.

Le malheureux avait commis
Une simple petite erreur :
Au lieu d'un Tigre, il avait mis
Un taureau dans son moteur.

Jean de la Futaille (Gabriel Macé - Les Fables de Jean de la Futaille - Numéro spécial du Canard Enchaîné, nov 1967)


Illustrations de France (c'est son nom) pour Les Fables de Jean de la Futaille.

À chacun ses raisons

Condamner la Myxomatose ?
Certainement ! Car, c'est un fait,
Elle n'a aucun effet
Sur les lapins que l'on nous pose.

Jean de la Futaille (Gabriel Macé - Les Fables de Jean de la Futaille)

La troisième est une fable-express :


Le Tiercé

Pégase, ce jour-là, est arrivé premier.
C'est un vol ! ont dit les turfistes.

Jean de la Futaille (Gabriel Macé - Les Fables de Jean de la Futaille)


Fables-express 

Voir Alphonse Allais, page 1

- Jean-Hugues Malineau -

Jean-Hugues Malineau (né en 1945), est un poète d'aujourd'hui, animateur d'ateliers de création poétique . Un des acteurs essentiels pour la diffusion, la connaissance des auteurs et des textes en milieu scolaire.
"Jean-Hugues Malineau propose des rencontres scolaires (de la maternelle à l'université) sur la poésie, ou des ateliers d'écriture durant lesquels il s'adresse à la sensibilité, à l'humour, à l'imagination, au sens rythmique, à la sensualité comme à la logique ou à la culture de l'enfant." Plus d'infos à son adresse Web (lien cliquable) : http://jhmalineau.free.fr/


Le ragondin

Un ragondin ragondait
Les gontes de milles et une gouttes
Aux grenouilles qui égoutaient
Gaptivées en gassant la groûte.

Jean-Hugues Malineau ("Pas si bêtes, les animaux" - Éditions de L'École des loisirs, 2003)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Le perroquet

C'est très coquet
Un perroquet

Des plumes rouges
Bleues violettes
Ça vit ça bouge
Et ça répète

C'est très coquet
Un perroquet

Dans un baquet
Un perroquet
Ça fait trempette
Et ça répète

C'est très coquet
Un perroquet

C'est beau, c'est sec
Après toilette
Et ça répète
Du bout du bec

C'est très coquet
Un perroquet

Tais ton caquet
Vieux perroquet
Mais ça répète
Saperlipopette

C'est très coquet
Un perroquet

Jean-Hugues Malineau ("Prête-moi tes plumes" - Éditions de L'École des loisirs, 1978)

- Stéphane Mallarmé -

Stéphane Mallarmé (1842-1898), est plus connu pour son oeuvre poétique difficile, ses pièces de théâtre ou ses traductions d'Edgar Poë que pour ses quatrains-poèmes, jugés mineurs.
D'autre part, l'humour n'est pas sa principale caractéristique. Voici pourtant un quatrain -adresse, parmi les nombreux qu"il a écrits sur des enveloppes,  courriers réeellement envoyés et parvenus à destination. On trouvera cet exemple et d'autres trésors, dans le gros livre de Claude Gagnière, "Au bonheur des mots" (éditions Robert Laffont, 1990)

Ci-dessus :
à Léon Vanier,son ami, éditeur de Paul Verlaine :


A toutes jambes, Facteur, chez l'
Editeur de la décadence,
Léon Vanier, Quai Saint Michel
Dix-neuf, gambade, cours et danse !

Le quatrain-adresse qui suit est de Georges Fourest (Voir pages précédentes le paragraphe consacré à cet auteur).
Il est cité par Claude Gagnière dans "Au bonheur des mots", et on observera que c'est aussi un acrostiche !
Ce poème est destiné à son ami Halary, comme on peut le lire verticalement.

Haïssant la tourbe incongrue
Au numéro 9 de la rue
Lecourbe, Halary dans Paris
A fixé, facteur, sa demeure :
Rapide et léger, va sur l'heure
Y porter ces vers manuscrits.

Une adresse pour d'autres quatrains-poèmes de Mallarmé :
http://www.corpusetampois.com/cle-19-mallarme-abbema.html

  1. -- -  - - - - - - - - - - - - - - - - -


Poème-adresse et Art postal

1. Poème-adresse

Le quatrain-adresse à la manière de Mallarmé est un art difficile. Il impose aux élèves des contraintes : rimes, métrique, mentions obligatoires.

On peut en simplifier la création :

  1. Le poème prend la forme choisie, rimé, vers libres, quatrain ou pas.

  2. Le poème et l'adresse du destinataire peuvent être dissociés, en partie ou totalement. Le texte apparaîtra sur l'enveloppe à côté de l'adresse. Écrit pour être lu par le destinataire, il vantera par exemple ses qualités ou ses défauts, de manière amusante, précisera les raisons de l'envoi de la lettre : invitation à un anniversaire ou autre événement, lettre de réclamation...

  3. Le support est une enveloppe de lettre ou,  pourquoi pas, un colis.

  4. Le destinataire une personne ou un animal, réel, imaginaire...

  5. Si l'adresse est fictive, elle peut jouer avec le poème (exemple ci-dessous), donner des indications.

  6. L'Art Postal (voir plus bas) est indissociable de la création poétique pour un projet abouti.




Exemple d'adresse :

Monsieur Lapin
12, rue des Terriers
Le Bois Joli


avec texte associé :

Veuillez trouver dans ce colis
en promotion chasse et nature
nos bouchons d'oreille anti-bruit
à régler avant l'ouverture*

(*de la chasse)

- -  - - - - - - - - - - - - -


2. Poème-adresse + Art postal

Le petit paquet, réalisé (virtuellement) avec les textes ci-dessus,  manque d' habillage plastique :

L'enveloppe ou le colis postal sera illustré, de toutes les manières possibles (peinture, collages...), en accord avec les textes.
Deux adresses Web entre autres pour l'art postal (Mail art) :
http://www.roswitha-guillemin.com/mailart/mailartcalls/expo/expomailartcall.htm
et

http://s110.photobucket.com/albums/n82/floxland/

- Pierre Menanteau -

Pierre Menanteau (1895-1992), enseignant et poète, est l'auteur d'anthologies poétiques ("Florilèges"), dans lesquelles il s'attache à faire connaître les auteurs anciens et contemporains pour la jeunesse.
Ses Oeuvres poétiques complètes en plusieurs tomes sont parues  aux Éditions Soc et Foc.

Ah ! que la Terre est belle

Ah ! que la Terre est belle.
Crie une voix là-haut,
Ah ! que la Terre est belle.
Sous le beau soleil chaud !

Elle est encore plus belle,
Bougonne l’escargot
Elle est encore plus belle
Quand il tombe de l’eau.

Vue d’en bas, vue d’en haut,
La Terre est toujours belle
Et vive l’hirondelle
Et vive l’escargot.

Pierre Menanteau ("Bestiaire pour un enfant poète" - éditions Pierre Seghers, 1958)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Au gui l'an neuf

Pour le meilleur et pour le pire
Le houx, le gui sont mariés.
La brume les a fiancés,
Noël conjugue leurs sourires.
Au gui, l'an neuf pour toutes peines,
Au gui, l'an neuf pour le bonheur
Des enfants qui chauffent leur coeur
Au vieux soleil des joies humaines !

Pierre Menanteau

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Le grillon

- Je suis grillé, dit le grillon
Le feu a pris dans ma maison.
- Il est grillé, dit la fourmi
Quel bon rôti pour mon dîner !
Mais les pompiers, la sauterelle et le criquet
Ont mis l'échelle pour arroser cette maison
Où le grillon allait griller.
Enfin sauvé ! Merci pompiers !
Tous les cris-cris vont s'accorder
Et dans le rond de l'amitié
Toute la nuit nous danserons.

Pierre Menanteau ("À l'école du buisson" - éditions Saint-Germain-des-Prés, 1971)

- Henri Michaux -

Henri Michaux (1899-1984) est né en Belgique. Il a acquis en 1955 la nationalité française. Il découvre Lautréamont (Les chants de Maldoror), dont on retrouve l'empreinte dans son œuvre écrite poétique, à la marge du Surréalisme. Il écrit des carnets de voyages (Écuador), d'autres récits, imaginaires ceux-là, de voyages (en Asie notamment), et des récits de ses expériences avec les drogues ...
Voir sur ce blog la catégorie qui lui est consacrée : HENRI MICHAUX et ses "Propriétés"

Le grand combat

Il l'emparouille et l'endosque contre terre ;
Il le rague et le roupéte jusqu'à son drâle ;
Il le pratéle et le libucque et lui baroufle les ouillais ;
Il le tocarde et le marmine,
Le manage rape à ri et ripe à ra.
Enfin il l'écorcobalisse.
L'autre hésite, s'espudrine, se défaisse, se torse et se ruine.
C'en sera bientôt fini de lui ;
Il se reprise et s'emmargine... mais en vain
Le cerveau tombe qui a tant roulé.
Abrah ! Abrah ! Abrah !
Le pied a failli !
Le bras a cassé !
Le sang a coulé !
Fouille, fouille, fouille,
Dans la marmite de son ventre est un grand secret.
Mégères alentours qui pleurez dans vos mouchoirs;
On s'étonne, on s'étonne, on s'étonne
Et on vous regarde,
On cherche aussi, nous autres le Grand Secret.

Henri Michaux ("Qui je fus" - NRF, 1927, paru en Poésie-Gallimard)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Mes occupations

Je peux rarement voir quelqu'un sans le battre. D'autres préfèrent le monologue intérieur. Moi, non. J'aime mieux battre.
Il y a des gens qui s'assoient en face de moi au restaurant et ne disent rien, ils restent un certain temps, car ils ont décidé de manger.
En voici un.
Je te l'agrippe, toc.
Je te le ragrippe, toc.
Je le pends au porte-manteau.
Je le décroche.
Je le repends.
Je le redécroche.
Je le mets sur la table, je le tasse et l'étouffe.
Je le salis, je l'inonde.
Il revit.
Je le rince, je l'étire (je commence à m'énerver, il faut en finir), je le masse, je le serre, je le résume et l'introduis dans mon verre, et jette ostensiblement le contenu par terre, et dis au garçon : " Mettez-moi donc un verre plus propre. "

Mais je me sens mal, je règle promptement l'addition et je m'en vais.

Henri Michaux ("La nuit remue" - NRF, 1937, paru également en Poésie-Gallimard)

- Michel Monnereau -

Michel Monnereau, est un écrivain et journaliste français, né en 1948.
Dernier roman : "On s'embrasse pas" (La Table Ronde, 2007) ; dernier recueil de poèmes : "27 poèmes pour la route" (L’épi de seigle, collection Poésie jeunesse, 2008).

Un soir... (titre proposé)

Un soir les diligences roulaient sur le toit
les cochers avaient le sang à la tête
les chevaux usaient poil à poil leur crinière.
A l'auberge les palefreniers marchaient sur la tête.
les tables, les quatre fers en l'air,
supportaient ainsi les verres.
Les bougies fondaient en larmes.
les chats se déplaçaient par roulades.
les œufs tombaient des nids.
La lune était accrochée par une ficelle.
Une pendule hoquetait.
Le vin ne restait pas sur l'estomac...

- Enfin, me dit ma mère,
tu vois bien que tu tiens ton livre à l'envers.

Michel Monnereau ("L'arbre à poèmes" - Nouveaux Cahiers de Jeunesse, 1973

- Jean-Luc Moreau -

Jean-Luc Moreau est né en 1937.


<< Les Poèmes de la souris verte (Le livre de Poche Jeunesse, Hachette - Fleurs d'encre, édition 2003 illustrée par Marie-Aude Waymel) - environ 190 pages, 5 € en librairie.

Poète et universitaire, il a publié des histoires et des poèmes pour les enfants et les adolescents, (L'arbre perché, Poèmes à saute-mouton, Devinettes, Les Poèmes de la souris verte, Dans ma famille* ), pour les plus grands (La Bride sur le cœur, Sous le masque des mots), ainsi que des anthologies et des traductions de poèmes. On trouve d'autres textes de cet auteur dans d'autres catégories du blog.

* dernier recueil pour les enfants paru : Dans ma famille (illustré par Eva Offredo, collection Gautier-Languereau, 2008) - environ 30 pages et 5 € en librairie.

Ce premier texte se trouve dans le recueil Les Poèmes de la souris verte, au chapitre "Le carré de l'hypoténuse"


Locataires

J'ai dans mon cartable
(C'est épouvantable !)
Un alligator
Qui s'appelle Hector.

J'ai dans ma valise
(Ça me terrorise !)
Un éléphant blanc
Du nom de Roland.

J'ai dans mon armoire
(Mon Dieu, quelle histoire !)
Un diplodocus
Nommé Spartacus.

Mais pour moi le pire,
C'est sous mon chapeau
D'avoir un vampire
Logé dans ma peau.

Jean-Luc Moreau ("Les Poèmes de la souris verte" Le livre de Poche Jeunesse Hachette - Fleurs d'encre, 1992 et 2003)



Poèmes à la manière de "J'ai dans  mon cartable..."

En utilisant la structure et l'esprit de ce poème, un document présente la démarche pédagogique d'une séance ICI (à partir de la page 28). Voyez aussi un travail réalisé ICI par des élèves de CE1, dans un CM2 ICI, ou encore ICI dans un CP.

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

La cour de mon école

La cour de mon école
Vaut bien, je crois,
La cour de Picrochole,
Le fameux roi :
Elle est pleine de charme,
Haute en couleur;
On y joue aux gendarmes
Et aux voleurs;
Loin des Gaulois, des Cimbres
Et des Teutons,
On échange des timbres,
À croupetons;
Des timbres des Antilles,
De Bornéo…
Et puis on joue aux billes
Sous le préau.
Qu'on ait pris la Bastille,
C'est merveilleux,
Mais que le soleil brille,
C'est encor mieux !
Orthographe et problèmes
Sont conjurés.
École, ah ! que je t'aime
À la récré !

Jean-Luc Moreau ("Les Poèmes de la souris verte" Le livre de Poche Jeunesse Hachette - Fleurs d'encre, 1992 et 2003)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Le cerf-volant

Soulevé par les vents
Jusqu'aux plus haut des cieux,
Un cerf-volant plein de superbe
Vit, qui dansait au ras de l'herbe,
Un petit papillon, tout vif et tout joyeux.

- Holà ! minable animalcule,
cria du zénith l'orgueilleux,
Ne crains-tu pas le ridicule ?
Pour te voir, il faut de bons yeux
Tu rampes comme un ver...
Moi je grimpe je grimpe
Jusqu'à l'Olympe,
Séjour des dieux.

- C'est vrai, dit l'autre avec souplesse,
Mais moi, libre, à mon gré,
je peux voler partout,
Tandis que toi, pauvre toutou,
Un enfant te promène en laisse.

Jean-Luc Moreau  (dans "La poésie comme elle s' écrit" de Jacques Charpentreau - Collection Enfance heureuse - Éditions ouvrières, 1979)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

La télévision

Quand on branche la télé,
Mes amis, quel défilé !
Le négus, le roi d’Écosse,
De vieux gus et de grands gosses,
Cendrillon dans son carrosse,
La véloce Carabosse
Chevauchant son balai-brosse,
Des prélats, des porte-crosses,
De beaux blonds, des rousses rosses,
Des colosses,
Des molosses,
Des rhinocéros atroces...
Et quand c’est le plus joli :
« Les enfants ! C’est l’heure ! Au lit ! »

Jean-Luc Moreau  (dans "La poésie comme elle s' écrit" de Jacques Charpentreau - Collection Enfance heureuse - Éditions ouvrières, 1979)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Chanson de l'heure qu'il est

- Monsieur, Monsieur , s'il vous plaît,
Dites-nous qu'elle heure il est !

- Il est ma petite fille 
L'heure où l'escargot s'habille ;
Il est, mon petit garçon
L'heure où sort le limaçon,

L'heure étrange et solennelle
Où chantent les coccinelles

Où la puce et ses enfants 
Vont dîner chez l'éléphant ;

Il est l'heure où la panthère
Épouse un coléoptère,

L'heure où tout peut arriver...
Où je dors... où vous rêvez...

Jean-Luc Moreau

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Trois petits pantins

Dans le clair matin,
Quand le lac est lisse,
Pétris de malice,
Trois petits pantins,
Trois gentils lutins
Quittent leur pelisse,
Trois lutins mutins
Mettent leurs patins.
Alors - ô délice,
O rire argentin !
Charmant tableautin,
Sur la glace glissent
Trois petits lutins
Malins comme Ulysse,
Trois beaux diablotins
Au rire enfantin
Dans le clair matin.

Jean-Luc Moreau ("L'Arbre perché" - Enfance heureuse, Éditions ouvrières, 1976)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Si ...

Si la sardine avait des ailes,
Si Gaston s'appelait Gisèle,
Si l'on pleurait lorsque l'on rit,
Si le Pape habitait Paris,
Si l'on mourait avant de naître,
Si la porte était la fenêtre,
Si l'agneau dévorait le loup,
Si les Normands parlaient zoulou,
Si la Mer Noire était la Manche,
Et la Mer Rouge la Mer Blanche,
Si le monde était à l'envers,
Je marcherais les pieds en l'air,
Le jour je garderais la chambre,
J'irais à la plage en décembre,
Deux et un ne feraient plus trois...
Quel ennui ce monde à l'endroit!

Jean-Luc Moreau ("L'Arbre perché" - Collection Enfance heureuse, Éditions ouvrières, 1976)


Poèmes à la manière de "Si ..."

 À partir de ce texte, des élèves de classe unique ont imaginé... ICI

Voir aussi le texte Avec des si ... de Claude Roy

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

L'oncle Octave

J'ai bourlingué, dit l'oncle Octave,
De Vancouver à Tamatave,
De ShangaÏ au Cap et jusqu'à
San José de Costa Rica.
Souventes fois je rêve encore
DeTimor et de Travancore,
Mais sachez-le, par-dessus tout
J'aime le Perche et le Poitou.

Jean-Luc Moreau ("L'Arbre perché" - Collection Enfance heureuse, Éditions ouvrières, 1976)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Une comptine pour les petits :

Quand le chat…

Quand
le chat
met ses
chaussettes,
c’est
la fête
aux sou-
ricettes.

Quand
le chat
joue au
cerceau,
c’est
la fête
aux sou-
riceaux.

Jean-Luc Moreau ("L'Arbre perché" - Collection Enfance heureuse, Éditions ouvrières, 1976)


Comptine à la manière de "Quand le chat..."

Cette petite comptine permet la création poétique de construction simple avec des noms d'animaux, prédateurs et proies potentielles, en utilisant rimes ou assonances  :

Quand le lion joue à la marelle / c'est la fête à la gazelle
Quand le lion joue à la belote / c'est la fête à l'antilope

[exemple proposé par le blog]

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Voici deux fables ou contrefables, allez savoir, qu'on trouve parmi d'autres dans le chapitre "Le Bidule et le Machinchose (Fables et contrefables)" du recueil "Les Poèmes de la souris verte" :

L'éléphant rose et la souris blanche

L'éléphant rose, un jour bouscula la souris
(pour un éléphant rose ,il était un peu gris !) ;
la souris quoique blanche, en eut une peur bleue,
(surtout que le balourd lui marcha sur la queue !)
"madame, excusez-moi, vraiment je suis navré..."
(il était si confus qu'il en aurait pleuré!)
Un éléphant qui pleure, est-il pire infortune ?
La souris toute émue, oublia sa rancune :
"Ce n'est rien, lui dit-elle en le réconfortant,
J'aurais pu vous en faire autant."
On tirera de cette histoire
une double moralité :
d'abord qu'un éléphant ne doit jamais trop boire
(et cela ne pas hésiter à le dire, à le répéter !)
mais surtout que ma souris blanche
est un fort bon exemple à donner aux enfants :
pour peu qu'elle eut pris sa revanche,
qu'eussions-nous fait de l'éléphant ?

Jean-Luc Moreau ("Les Poèmes de la souris verte" Le livre de Poche Jeunesse Hachette - Fleurs d'encre, 1992 et 2003)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

L'hippopotame

Par la Seine un hippopotame
S’en vint un jour jusqu’à Paname.
Il descendit dans le métro,
Changea même à Trocadéro
Mais quand il fut à la Concorde,
Il s’écria: «Miséricorde !»
Et par la Porte des Lilas
S’en alla.

Jean-Luc Moreau ("L'Arbre perché" - Collection Enfance heureuse, Éditions ouvrières, 1976)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Le renard et le corbeau
ou si l'on préfère
la (fausse) poire et le (vrai) fromage  

Or donc, Maître Corbeau,
Sur son arbre perché, se disait: « Quel dommage
Qu'un fromage aussi beau,
Qu'un aussi beau fromage
Soit plein de vers et sente si mauvais.

Tiens ! voilà le renard : je vais,
Lui qui me prend pour une poire,
Lui jouer, le cher ange, un tour de ma façon.
Ça lui servira de leçon ! »
Passons sur les détails, vous connaissez l'histoire
Le discours que le renard tient,
Le corbeau qui ne répond rien
(Tant il rigole !),
Bref, le fromage dégringole...
Depuis, le renard n'est pas bien ;
Il est malade comme un chien.

Jean-Luc Moreau ("Les Poèmes de la souris verte" Le livre de Poche Jeunesse Hachette - Fleurs d'encre, 1992 et 2003)

 

- Carl Norac -

Carl Norac est un poète et romancier belge né en 1960, auteur de recueils de poésie et d'albums pour la jeunesse. C'est le fils de Pierre Coran (son nom d'auteur est un anagramme).


Ci-après, un poème-acrostiche - voir le paragraphe JEUX de la page 1 de cette catégorie (par retour au sommaire) pour d'autres acrostiches et des idées de création


Étoile ou étincelle

Pour qu'elle soit plus belle*,
Osons déshabiller nos phrases
Et nos pensées.
Surprise, elle devient
Imaginairement
Etoile ou étincelle.

* au singulier, la phrase se réfère à la poésie, sous-entendue en acrostiche.
Carl Norac (dans "
Lettres du  géant à l’enfant qui passe suivi du ..." - Labor Éditions, collection Espace Nord, 2002)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Poème du cartable rêveur

Pendant que tu étais
Sur la plage, cet été,
Ou bien dans la forêt,
As-tu imaginé
Que ton cartable rêvait ?
Il rêvait d’avaler
Des crayons, des cahiers,
Puis d’aller, comme on vole,
Sur le chemin de l’école.

Carl Norac

- Géo Norge -

Géo Norge (1898-1990), qui signe la plupart du temps "Norge" tout court, est un poète belge.

Zoziaux

Amez bin li tortorelle,
Ce sont di zoziaux
Qui rocoulent por l’orelle
Di ronrons si biaux.

Tout zoulis de la purnelle,
Ce sont di zoziaux
Amoreux du bec, de l’aile,
Du flanc, du mousiau.

Rouketou, rouketoukou
Tourtourou torelle
Amez bin li roucoulou
De la tortorelle.

On dirou quand on l’ascoute
Au soleil d’aoûte
Que le bonhor, que l’amor
Vont dorer tozor.

Géo Norge ("La Langue verte", Œuvres poétiques - Seghers, 1978)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Monsieur
      
Je vous dis de m’aider,
Monsieur est lourd.
Je vous dis de crier,
Monsieur est sourd.
Je vous dis d’expliquer,
Monsieur est bête.
Je vous dis d’embarquer,
Monsieur regrette.
Je vous dis de l’aimer,
Monsieur est vieux.
Je vous dis de prier,
Monsieur est Dieu.
Éteignez la lumière,
Monsieur s’endort.
Je vous dis de vous taire,
Monsieur est mort.

Géo Norge ("Famines", Œuvres poétiques - Seghers, 1978)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Oubli

Il y pensa beaucoup.
Puis il y pensa moins
Il y pensa très peu.
Puis il n'y pensa plus.

Il trouva même très drôle
d'y avoir tant pensé.
Puis ne pensa plus même
qu'il y pensa jamais.

Géo Norge ("Eux les anges" - éditions Flammarion, 1978)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Avertissement : "Totaux" est présenté ici en version intégrale.  En version scolaire, les deux vers en italique couleur sont absents :

Totaux

Ton temps têtu te tatoue
T’as-ti tout tu de tes doutes ?
T’as-ti tout dû de tes dettes ?
T’as-ti tout dit de tes dates ?
T’a-t-on tant ôté ta teinte ?
T’a-t-on donc dompté ton ton ?
T’as-ti tâté tout téton ?
T’as-ti tenté tout tutu ?

T’es-ti tant ? T’es-ti titan ?
T’es-ti toi dans tes totaux ?
Tatata,tu tus ton tout.

Géo Norge ("La Langue Verte" - éditions Gallimard, 1954)
Irrésistible ! Ecoutez ici trois interprétations de ce texte, qu'a diffusées la RTBF (Radio belge) :
http://www.vousprendrezbienunvers.be/actions/radio.html

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

La Faune

    Et toi, que manges-tu, grouillant ?
— Je mange le velu qui digère
le pulpeux qui ronge le rampant.

Et toi, rampant, que manges-tu ?
— Je dévore le trottinant qui bâfre
l’ailé qui croque le flottant.

Et toi, flottant, que manges-tu ?
— J’engloutis le vulveux qui suce le ventru
qui mâche le sautillant.

Et toi sautillant que manges-tu ?
— Je happe le gazouillant qui gobe
le bigarré qui égorge le galopant.

Est-il bon, chers mangeurs, est-il
bon, le goût du sang ?
— Doux, doux ! tu ne sauras jamais
comme il est doux, herbivore !

Géo Norge ("Famines" - éditions Stols, 1950)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -- - -

On peut se tromper

— Tiens… c'est une girafe
Et j'ai cru si longtemps que c'était un pommier.
— Alors ces pommes que j'aimais tant ?
— C'était de la crotte, Aristide.
— De la crotte ! Alors j'aimais de la crotte ?
— Mais oui, Aristide, on peut se tromper…
Et le principal c'est d'aimer.

Géo Norge ("Cerveaux brûlés" - éditions Flammarion, 1969)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -- - -

Chant du merle

La roue en avait assez
De trimballer la charrette.
Le poivre en avait assez
D'assaisonner la blanquette.
Assez que l'eau chaude avait
De cuire à point les navets,
Le feu d'exciter l'eau chaude,
Le four d'enfler la farine
Et le poète ses odes.
La rose était écœurée
De caresser les narines.
Un dormant raz de marée
Couvrit toute la machine.
Assez ! assez, plus qu'assez
Geignaient mille pots cassés.
Le cœur lui-même était las,
Oh ! las de voler si bas.
Tout dormait, dorma, dormut
Dans les vieux pays fourbus.
Et tout dormirait encore,
Tout dormirait à jamais,
Si, tout à coup dans l'aurore
D'un joli mai qui germait,
Perlant, fusant à la ronde,
Le chant d'un merle jeunet
N'avait réveillé le monde.

Géo Norge ("La Belle Saison" - éditions Flammarion, 1993)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

SI...Si

    Avec des si, on verrait picorer les vaches, on verrait brouter les poules. Les cochons butineraient
et l'on ferait du boudin d'abeille. D'ailleurs la gauche serait la droite et personne n'en saurait rien.
Le monde est toujourts naturel.

Géo Norge ("Mirlitons"- éditions de L'École des loisirs, 1978)

- René de Obaldia -

René de Obaldia est né en 1918. Auteur de théâtre (Le Satyre de la Villette, Le Banquet des méduses, Du vent dans les branches de sassafras ...) et de romans (Tamerlan des coeurs, Le centenaire), il est membre de l'Académie française depuis 1999.

Déjà présentes dans d'autres catégories du blog, revoici pour l'humour du Printemps des Poètes 2009, quelques textes choisis de René de Obaldia.



"Innocentines" (1969 - collection "Les cahiers rouges" - Grasset) est un de ses quatre recueils de poésies. Du bonheur pour 8 euros, vraiment un livre de poésie à se procurer. (Photo : Lieucommun)

Le sous-titre annonce : "Poèmes pour les enfants et quelques adultes".
René de Obaldia y prend avec le langage et les situations, toutes les libertés, privant ainsi (pour notre plaisir quand même), les élèves de l'accès à la plupart des textes.

On retrouvera certains poèmes dans d'autres catégories pour la classe.

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Dimanche

Charlotte
fait de la compote

Bertrand
suce des harengs

Cunégonde
se teint en blonde

Épaminondas
cire ses godasses

Thérèse
souffle sur la braise

Léon
peint des potirons

Brigitte
s'agite, s'agite

Adhémar
dit qu'il en a marre

La pendule
fabrique des virgules

Et moi dans tout cha ?
Et moi dans tout cha ?
Moi, ze ne bouze pas
Sur ma langue z'ai un chat

René de Obaldia


Poèmes à la manière de "Dimanche" 

Document autour de ce texte, avec commentaires et exploitation ici à cette adresse :
http://www.gommeetgribouillages.fr/CP/Dimanche.pdf
(copier-coller dans votre navigateur, le lien s'ouvrira avec Acrobat Reader - fichier protégé en copie). 

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Moi j'irai dans la lune

Moi, j'irai dans la lune
Avec des petits pois,
Quelques mots de fortune
Et Blanquette, mon oie.

Nous dormirons là-haut
Un p'tit peu de guingois
Au grand pays du froid
Où l'on voit des bateaux
Retenus par le dos.

Bateaux de brise-bise
Dont les ailes sont prises
Dans de vastes banquises
Et des messieurs sans os
Remontent des phonos.

Blanquette sur mon coeur
M'avertira de l'heure :
Elle mange des pois
Tous les premiers du mois.

Elle claque du bec
Tous les minuits moins sept.
...
Pas besoin de fusée
Ni de toute une armée,
Je monte sur Blanquette
Hop ! on est arrivé.

René de Obaldia

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

J’ai trempé mon doigt dans la confiture  

J’ai trempé mon doigt dans la confiture
turelure
Ça sentait les abeilles
Ça sentait les groseilles
Ça sentait le soleil
J’ai trempé mon doigt dans la confiture
Puis je l’ai sucé
Comme on suce les joues de bonne grand-maman
Qui n’a plus mal aux dents
Et qui parle de fées...
Puis je l’ai sucé
Sucé
Mais tellement sucé
Que je l’ai avalé

René de Obaldia

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Le texte suivant (en version réduite) est aussi pour la classe :

Chez moi (extrait)

Chez moi, dit la petite fille
On élève un éléphant.
Le dimanche son oeil brille
Quand Papa le peint en blanc.

Chez moi, dit le petit garçon
On élève une tortue.
Elle chante des chansons
En latin et en laitue.

Chez moi, dit la petite fille
Notre vaisselle est en or,
Quand on mange des lentilles
On croit manger un trésor.

Chez moi, dit le petit garçon
Vit un empereur chinois.
Il dort sur le paillasson
Aussi bien qu’un Iroquois.

Iroquois ! dit la petite fille.
Tu veux te moquer de moi.
Si je trouve mon aiguille,
Je vais te piquer le doigt !

René de Obaldia (Innocentines")

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

En voici la version intégrale, pour les grands enfants :

Chez moi

Chez moi, dit la petite fille
On élève un éléphant.
Le dimanche son œil brille
Quand papa le peint en blanc

Chez moi, dit le petit garçon
On élève une tortue.
Elle chante des chansons
En latin et en laitue.

Chez moi, dit la petite fille
Notre vaisselle est en or.
Quand on mange des lentilles
On croit manger un trésor.

Chez moi, dit le petit garçon
Nous avons une soupière
Qui vient tout droit de Soissons
Quand Clovis était notaire.

Chez moi, dit la petite fille
Ma grand-mère a cent mille ans.
Elle joue encore aux billes
Tout en se curant les dents.

Chez moi, dit le petit garçon
Mon grand-père a une barbe
Pleine pleine de pinsons
Qui empeste la rhubarbe.

Chez moi, dit la petite fille
Il y a trois cheminées
Et lorsque le feu pétille
On a chaud de trois côtés.

Chez moi, dit le petit garçon
Passe un train tous les minuits.
Au réveil mon caleçon
Est tout barbouillé de suie.

Chez moi, dit la petite fille
Le pape vient se confesser.
Il boit de la camomille
Une fois qu’on l’a fessé.

Chez moi, dit le petit garçon
Vit un Empereur chinois.
Il dort sur un paillasson
Aussi bien qu’un Iroquois.

Iroquois ! dit la petite fille
Tu veux te moquer de moi !
Si je trouve mon aiguille
Je vais te piquer le doigt !

Ce que c’est d’être une fille !
Répond le petit garçon.
Tu es bête comme une anguille
Bête comme un saucisson.

C’est moi qu’ai pris la Bastille
Quand t’étais dans les oignons.
Mais à une telle quille
Je n’en dirai pas plus long !

René de Obaldia (Innocentines")

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Celui-ci, plus difficile, est très représentatif du recueil "Les Innocentines" :

Le plus beau vers de la langue française

« Le geai gélatineux geignait dans le jasmin »
Voici, mes zinfints
Sans en avoir l’air
Le plus beau vers
De la langue française.
Ai, eu, ai, in
Le geai gélatineux geignait dans le jasmin…
Le poite aurait pu dire
Tout à son aise :
« Le geai volumineux picorait des pois fins »
Eh bien ! non, mes infints
Le poite qui a du génie
Jusque dans son délire
D’une main moite
A écrit :
« C’était l’heure divine où, sous le ciel gamin,
LE GEAI GÉLATINEUX GEIGNAIT DANS LE JASMIN. »

Gé, gé, gé, les gé expirent dans le ji.
Là, le geai est agi
Par le génie du poite
Du poite qui s’identifie
À l’oiseau sorti de son nid
Sorti de sa ouate.
Quel galop !
Quel train dans le soupir !
Quel élan souterrain!
Quand vous serez grinds
Mes zinfints
Et que vous aurez une petite amie anglaise
Vous pourrez murmurer
À son oreille dénaturée
Ce vers, le plus beau de la langue française
Et qui vient tout droit du gallo-romain:
« Le geai gélatineux geignait dans le jasmin. »
Admirez comme
Voyelles et consonnes sont étroitement liées
Les zunes zappuyant les zuns de leurs zailes.
Admirez aussi, mes zinfints,
Ces gé à vif,
Ces gé sans fin

René de Obaldia ("Innocentines")

- - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Celui-ci, plutôt direct, également :

Manège

Les chevaux de bois sont pas tous en bois
Les petits cochons vont pas tous en rond.

La dernière fois
Le cheval de bois
Que j'avais monté
Voulait m'renverser.
J'ai pris son oreille
Je lui ai mordu
Le sang de l'oreille
Je lui ai tout bu.
Alors il m'a dit :
"Pourquoi tu m'fais mal ?
Je n'suis qu'un cheval
Tu n'es pas gentil."
Et il m'a promis
Que quand je voudrais
Il m'emporterait
Jusqu'au Paradis !

Le petit cochon
Aux yeux de mouton
Que j'avais monté
Un beau jour d'été
Voulait s'échapper
Des autres cochons.
Il courait si vite
Qu'il faillit me tuer,
Ça sentait les frites
De tous les côtés !
Mais j'tirai si fort
Sur sa queue en or
Qu'elle me resta
Entre les dix doigts.
Je l'ai rapportée
L'soir à la maison,
Ça sert aux dîners
Comme tir'bouchon.

Les chevaux de bois sont pas tous en bois
Les petits cochons vont pas tous en rond.

René de Obaldia ("Innocentines")

Quelques autres titres de textes, pour vous donner envie  :
"Une dame très très morte", "Yous pique angliche", "Le col du fémur", "Berceuse de l'enfant qui ne veut pas grandir", "Ouiquenne", "Julot-Mandibule", "Antoinette et moi" ... il y a en tout soixante-dix textes, ça fait quoi ... à peine 10 centimes d'euro le poème, et on a quoi sinon, pour 10 centimes d'euro ?

 

<< ci-contre

l’affiche officielle

et le projet en milieu scolaire à Mantes-la-Ville (Yvelines) >>

es textes proposés dans cette page ont déjà été mis en ligne en 2009 sur le blog lieucommun.canalblog.com où ils sont toujours :
PRINT POÈTES 2009 : L'HUMOUR des poètes - lieu commun
pour le PRINTEMPS DES POÈTES 2009, «EN RIRES»
La plupart visent une utilisation par les élèves d’ELEMENTAIRE, mais leur niveau va de la MATERNELLE au LYCÉE. Ce n’est pas indiqué faute de temps.