poésies par thème : l’école

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l’école, la classe, les apprentissages

d’autres poésies sur le thème de l’école et sur d’autres thèmes ont toujours à cette adresse :

blog lieucommun poésies

colonne ci-dessous :

  1. 1.Corinne Albaut : Les trois classes (image ci-contre), sept jours sur sept

  2. 2.Sophie Arnould : La leçon

  3. 3.Luc Bérimont : Conjugaison de l'oiseau, Comptine

  4. 4.Alain Boudet : A l'école des nuages

  5. 5.René-Guy Cadou : La blanche école où je vivrai, Automne, La saison de Sainte-Reine

  6. 6.Maurice Carême : L'école, Notre école, Trois escargots, L'enfant, D'une bouteille d'encre, Ponctuations

  7. 7.Jacques Charpentreau : L'école

  8. 8.Pierre Coran : Le poisson rouge

  9. 9.Gabriel Cousin : Rentrée des classes

  10. 10.Jean Desmeuzes : Je vois, disait le cantonnier...

  11. 11.Jean Follain : L’ordre

  12. 12.Maurice Fombeure : Les écoliers

  13. 13.Pierre Gamarra : Mon cartable, Mon école

  14. 14.Victor Hugo : Les enfants lisent, têtes blondes

  15. 15.Kobayashi Issa : Haïku

colonne de droite :

  1. 16.Francis Jammes : Souvenirs d'enfance

  2. 17.Georges Jean : L'école est fermée

  3. 18.Pierre Lozère : L'heure des mamans (comptine-chanson)

  4. 19.Pierre Menanteau : À l'école du buisson

  5. 20.Christian Merveille : C'est la rentrée

  6. 21.Jean-Luc Moreau : La cour de mon école, La rentrée

  7. 22.Carl Norac : Poème du cartable rêveur

  8. 23.Jacques Prévert : Le cancre, Page d’écriture, En sortant de l'école

  9. 24.Raymond Queneau : L'écolier, Un enfant a dit...

  10. 25.Claude Roy : Quand nous étions enfants, L'enfant qui battait la campagne

  11. 26.Pierre Ruaud : Je voulais dans mon cartable, C'est la récré (comptine)

  12. 27.Philippe Soupault : Grammaire

  13. 28.Jules Supervielle : Mathématiques

  14. 29.Paul Vincensini : Un enfant veut répondre

1. Corinne Albaut écrit, publie, interprète des comptines pour les petits (Collection "Petits bonheurs" chez Actes Sud junior)

Elle dirige aussi la collection "Les Romans Bleus" (Gulf Stream éditeur - 2006), pour les ados de 11 à 14 ans, dans laquelle elle a écrit Chicago Blues. D'autres romans sont parus chez Acte Sud junior.

On trouvera sur ce site et sur le blog www.lieucommun.canalblog.com
le texte «Les Crayons», de Corinne Albaut (catégorie poésies Cycle 2).
Autre recueil de comptines du même auteur : Comptines pour la rentrée des classes - Actes Sud Junior, 1997.


Les trois classes
(une des variantes de ce texte)


Dans la classe

de Monsieur Leblond,

On cultive des potirons.


Dans la classe

de Madame Levert,

On cultive des primevères.


Dans la classe

de Mademoiselle Legris,

On cultive des radis.


Dans son bureau

La directrice, elle

fait pousser des myosotis.


Corinne Albaut


Sept jours sur sept


Sept jours, dans la semaine,

Pour porter tout ce que j'aime.

Lundi, mon tee-shirt canari,

Mardi, mon pull gris souris,

Mercredi, mon short kaki,

Jeudi, mon bermuda fleuri,

Vendredi, ma chemise bleu nuit,

Samedi, mon polo cramoisi,

Dimanche, ma casquette blanche.


Chic, des pieds à la tête,

Sept jours sur sept.


Corinne Albaut ("Comptines pour compter" - collection "Les Petits Bonheurs", Actes Sud Junior, 1997)

2. Sophie Arnould a publié plusieurs recueils de comptines (ouvrages récents : 101 comptines des quatre saisons - Bayard Jeunesse - 2001 ; Comptines de ma famille idem 2006).

En voici une, de comptine, sur le thème de l'école. On la retrouve dans : Petites comptines pour tous les jours (Nathan 1995), ouvrage rassemblant des textes de différents auteurs.


La leçon


"Coin, coin, coin,

C'est le pingouin ?"

"Non Gaspard,

C'est le canard !"


"Cui, cui, cui,

C'est la souris ?"

"Non Marion,

C'est l'oisillon !"


"Ouah, ouah, ouah,

C'est le boa ?"

"Non Martin

C''est le chien* !"


"Et miaou,

C'est le hibou ?"

"Pas du tout,

C'est le matou !"


La leçon d'aujourd'hui

Est maintenant finie,

Demain nous apprendrons

À compter les moutons !


* merci à Michel de nous avoir signalé une erreur, rectifiée.
N’hésitez pas à faire de même le cas échéant (par courriel à l’adresse sur la page de bienvenue) ...


Sophie Arnould (dans "Petites comptines pour tous les jours", Nathan)

  1. 3.Luc Bérimont (1915-1983), poète et romancier, a été un poète engagé. Dans la Résistance pendant la deuxième guerre mondiale, dans ses écrits poétiques, et dans la défense et la promotion de la poésie et de la chanson nouvelles, à l'image du poète-éditeur Pierre Seghers, qu'il a côtoyé.
    Il a animé lui-même des émissions de radio pour faire connaître chanteurs et poètes («La Fine Fleur»).
    On peut trouver quelques textes de  Luc Bérimont chantés par Léo Ferré («Merde à Vauban»), Marc Ogeret ou Pierre Bertin.
    Ses «Poésies complètes» ont été éditées par le Cherche Midi et les Presses universitaires d’Angers en trois volumes, de 2000 à 2009, mais ce tirage limité est épuisé (logique) et pratiquement introuvable. Une réédition est évoquée ici ou là ...
    Romancier également avec "Les Loups De Malenfance» , «Le bois Castiau», etc.


Voici une poésie qui se conjugue pour exercer la mémoire :


La leçon


J’écris (à la pie)
J’écrivais (au geai)
J’écrivis (au courlis)
J’écrirai (au pluvier)
J’écrirais (au roitelet)
Écris ! (au sirli)
Que j’écrive (à la grive)
Que j’écrivisse (à l’ibis)
Écrivant (au bruant)
Écrit (au pipit)


Luc Bérimont ("La Poésie comme elle s'écrit")


et une comptine connue :


Comptine


Pomme et poire

Dans l’armoire

Fraise et noix

Dans le bois

Plume et colle

Dans l’école

Sucre et pain

Dans la main

Et le faiseur de bêtises

Bien au chaud

Dans ma chemise


Luc Bérimont ("Comptines pour enfants d'ici" et les canards sauvages)

4. Alain Boudet est un poète (très) contemporain.


"Être poète, c'est peut-être vivre en état permanent de veille sensible ..."


Écolier dans la lune


À l’école des nuages

On découvre des pays

Où nul n’est jamais parti

Pas même les enfants sages.


Le soleil avec la pluie

L’orage avec l’accalmie

La météorologie

Bouscule le temps

Les visages

Et les couleurs de nos cris

Dans la cour des éclaircies.


Les oiseaux n’ont pas d’histoires

Les arbres n’ont pas d’ennuis

À l’école des nuages

Aucun enfant n’est puni

Les rêves tournent les pages

Aucune leçon ne t’ennuie

C’est l’école des nuages

Elle t’ouvre sur la vie.


Alain Boudet (paru dans l'anthologie "L’école des poètes" - collection "Fleur d'Encre" dirigée par Joël Sadeler, éditions Hachette, 1998) - On trouve également ce texte dans le manuel  "Les clés du français", Cycle 3 CM1, aux éditiond SED, page 28.

5. René Guy Cadou (1920-1951) avait écrit, comme une prémonition : "Je ne ferai jamais que quelques pas sur cette terre".
À partir de 1943, Hélène, épousée en 1946, l'accompagne.
C’est Hélène Cadou , poète comme lui, pour qui il a écrit "Hélène ou le règne végétal", publié en février 1951.
Le poète est mort de maladie en mars de la même année, à 31 ans.


Je t'atteindrai Hélène

À travers les prairies

À travers les matins de gel et de lumière ...


Son œuvre poétique complète, "Poésie, la vie entière", est parue en 1976 chez l'éditeur Pierre Seghers (poète également).


La blanche école où je vivrai


La blanche école où je vivrai

N'aura pas de roses rouges

Mais seulement devant le seuil

Un bouquet d'enfants qui bougent

On entendra sous les fenêtres

Le chant du coq et du roulier;

Un oiseau naîtra de la plume

Tremblante au bord de l'encrier

Tout sera joie! Les têtes blondes

S'allumeront dans le soleil,

Et les enfants feront des rondes

Pour tenter les gamins du ciel.


René Guy Cadou


Automne


Odeur des pluies de mon enfance

Derniers soleils de la saison !

A sept ans comme il faisait bon

Après d'ennuyeuses vacances,

Se retrouver dans sa maison !


La vieille classe de mon père,

Pleine de guêpes écrasées,

Sentait l'encre, le bois, la craie

Et ces merveilleuses poussières

Amassées par tout un été.


O temps charmant des brumes douces,

Des gibiers, des longs vols d'oiseaux,

Le vent souffle sous le préau,

Mais je tiens entre paume et pouce

Une rouge pomme à couteau.


René-Guy Cadou ("Les amis d’enfance " ; "Poésie, la vie entière" - Seghers)


La saison de Sainte-Reine


Je n’ai pas oublié cette maison d’école

Où je naquis en février dix neuf cent vingt

Les vieux murs à la chaux ni l’odeur du pétrole

Dans la classe étouffée par le poids du jardin

Mon père s’y plaisait en costume de chasse

Tous deux nous y avions de tendres rendez-vous

Lorsqu’il me revenait d’un monde de ténèbres

D’une Amérique à trois cents mètres de chez nous

Je l’attendais couché sur les pieds de ma mère

Comme un bon chien un peu fautif d’avoir couru

Du jardin au grenier des pistes de lumière

Et le poil tout fumant d’univers parcourus

La porte à peine ouverte il sortait de ses manches

Des jeux de cartes des sous belges ou des noix

Et je le regardais confiant dans son silence

Pour ma mère tirer de l’amour de ses doigts

Il me parlait souvent de son temps de souffrance

Quand il était sergent-major et qu’il montait

Du côté de Tracy-le-Mont ou de la France

La garde avec une mitrailleuse rouillée

Et je riais et je pensais aux pommes mûres

À la fraîcheur avoisinante du cellier

À ce parfum d’encre violette et de souillure

Qui demeure longtemps dans les sarraus mouillés

Mais ce soir où je suis assis près de ma femme

Dans une maison d’école comme autrefois

Je ne sais rien que toi Je t’aime comme on aime

Sa vie dans la chaleur d’un regard d’avant soi.


René Guy Cadou - 1953 - ("Hélène ou le règne végétal")

6. Maurice Carême, instituteur belge (1899-1978) est présent dans chaque cahier de poésie des élèves de France et de Navarre (et de Belgique bien sûr).

(Merci à la Fondation Maurice Carême)


L'école


L'école était au bord du monde,

L'école était au bord du temps.

Au dedans, c'était plein de rondes ;

Au dehors, plein de pigeons blancs.

On y racontait des histoires

Si merveilleuses qu'aujourd'hui,

Dès que je commence à y croire,

Je ne sais plus bien où j'en suis.

Des fleurs y grimpaient aux fenêtres

Comme on n'en trouve nulle part,

Et, dans la cour gonflée de hêtres,

Il pleuvait de l'or en miroirs.

Sur les tableaux d'un noir profond,

Voguaient de grandes majuscules

Où, de l'aube au soir, nous glissions

Vers de nouvelles péninsules.

L'école était au bord du monde,

L'école était au bord du temps.

Ah ! que n'y suis-je encor dedans

Pour voir, au dehors, les colombes.


Maurice Carême ("La flûte au verger")


Notre école


Notre école se trouve au ciel.

Nous nous asseyons prés des anges.

Comme des oiseaux sur les branches.

Nos cahiers d'ailleurs ont des ailes.


A midi juste, on y mange,

Avec du vin de tourterelle,

Des gaufres glacées à l'orange

Les assiettes sont en dentelle.


Pas de leçon, pas de devoirs

Nous jouons quelque fois, le soir

Au loto avec les étoiles.


Jamais nous ne rêvons la nuit

Dans notre petit lit de toile

L'école est notre paradis.


Maurice Carême ("le moulin de papier" - Nathan)


Trois escargots  


J'ai rencontré trois escargots

Qui s'en allaient cartable au dos

Et dans le pré trois limaçons

Qui disaient par cœur leur leçon.

Puis dans un champ, quatre lézards

Qui écrivaient un long devoir.

Où peut se trouver leur école ?

Au milieu des avoines folles ?

Et leur maître est-il ce corbeau

Que je vois dessiner là-haut

De belles lettres au tableau ?


Maurice Carême


L'enfant


A quoi jouait-il cet enfant ?

Personne n'en sut jamais rien.

On le laissait seul dans un coin

Avec un peu de sable blanc

On remarquait bien, certains jours,

Qu'il arquait les bras, tels des ailes

Et qu'il regardait loin, très loin,

Comme du sommet d'une tour.

Mais où s'en allait-il ainsi

Alors qu'on le croyait assis ?

Lui-même le sut-il jamais ?

Dès qu'il refermait les paupières,

Il regagnait le grand palais,

D'où il voyait toute la mer.


Maurice Carême


L'écolière


Bon Dieu ! que de choses à faire !

Enlève tes souliers crottés,

Pends donc ton écharpe au vestiaire,

Lave tes mains pour le goûter,


Revois tes règles de grammaire.

Ton problème, est-il résolu ?

Et la carte de l'Angleterre,

Dis, quand la dessineras-tu ?


Aurai-je le temps de bercer

Un tout petit peu ma poupée,

De rêver, assise par terre,

Devant mes châteaux de nuées ?

Bon Dieu ! que de choses à faire !


Maurice Carême ("La grange bleue")

8. Pierre Coran,
Encore un ancien instituteur, décidément ...
Pierre Coran est né en 1934. Poète et romancier pour la jeunesse, la liste est longue de ses écrits. Des textes sont présents sur ce blog ( Paris blanc - Le chameau ...) mais voici ce qui se passe dans son école.


Le poisson rouge


Le poisson rouge

De mon école

A la rougeole.


Il ne veut pas

Que chacun voit

Ses boutons rouges.


Dès que l'eau bouge

Le peureux plonge

Sous une éponge.


Moi je connais

La vérité

Mais je me tais.


Le poisson sait

Que dans l'école

Je cache et colle


Mon chewing-gum

Sous l'aquarium.


Pierre Coran

7. Jacques Charpentreau, né en 1928 était également instituteur, et il est aussi présent que Maurice Carême dans les pages des cahiers de poésie. Il est l'auteur de nombreux recueils de poésies, et d'anthologies poétiques pour les enfants (Les plus beaux poèmes d'hier et d'aujourd'hui, avec Jacqueline Saint-Jean -Hachette jeunesse - 1998 ; Poèmes pour peigner la girafe, avec Florence Koenig - Gautier-Languereau - 1994 ; "Jouer avec les poètes, coll Fleurs d'encre - Le Livre de Poche - 2002).

Le poème qui suit est déjà présent sur la page des POÉSIES pour la CLASSE - CYCLES 2 et 3


L'école


Dans notre ville, il y a

Des tours, des maisons par milliers,

Du béton, des blocs, des quartiers,

Et puis mon coeur, mon coeur qui bat

Tout bas.


Dans mon quartier, il y a

Des boulevards, des avenues,

Des places, des ronds-points, des rues

Et puis mon coeur, mon coeur qui bat

Tout bas.


Dans notre rue, il y a

Des autos, des gens qui s'affolent,

Un grand magasin, une école,

Et puis mon coeur, mon coeur qui bat

Tout bas.


Dans cette école, il y a

Des oiseaux chantant tout le jour

Dans les marronniers de la cour.

Mon coeur, mon coeur, mon coeur qui bat

Est là.


Jacques Charpentreau

9. Gabriel Cousin, poète et scénariste de théâtre, est né en 1918.

«La poésie ne doit pas être évasion, mais au contraire prise de conscience du monde et de la vie»



Rentrée des classes


Tous les deux habillés de neuf nous allons la main dans la main.

Sur les pavés du petit matin, l'eau du ruisseau brille et cela vaut la peine de mettre le pied dedans.

Nous regardons au loin et déjà nous sommes enfermés dans le cartable.

Nous avons vu les plus grands devenir

un peu Gaulois

un peu pluriel

un peu Henri IV

un peu débit de robinet

un peu passé composé.

Un autre monde va s'ouvrir. Peut-être est-il plus transparent que l'eau du ruisseau et plus beau que les escaliers où les cris rebondissent.


Gabriel Cousin ("Poèmes d'un grand-père pour de grands enfants" - Éditions Saint-Germain-des-Prés - 1980)

  1. 10.L’école de Jean Desmeuzes (1931-2006) était une école de «billes dans les poches» et de "tabliers qui s'effilochent".


Je vois, disait le cantonnier ...


Je vois, disait le cantonnier

dévaler au matin dans une course folle

les enfants des hameaux qui s'en vont à l'école

par les chemins et les sentiers

avec des billes dans les poches

des tabliers qui s’effilochent

et des cheveux embroussaillés

où le clair vent d'octobre accroche

l'or qui s'envole des paillers

l'or qui s'envole vole vole

l'or qui s’envole des paillers

au toit de la maison d'école

la girouette a divagué

la girouette est tombée folle

faut le dire au maître d'école

pour la bonne aventure ô gué!

Ainsi chantait le cantonnier.


Jean Desmeuzes

11. Jean Follain (1903-1971) a côtoyé les poètes André Salmon, Pierre Reverdy, Pierre Mac Orlan, Max Jacob, dans la mouvance surréaliste, mais il s’en est tenu à l'écart, puis Eugène Guillevic et Pierre Albert-Birot.


L’ordre


L’écolier qui balayait la classe

à tour de rôle était choisi

alors il restait seul

dans la crayeuse poussière

près d’une carte du monde

que la nuit refroidissait

quelquefois il s’arrêtait, s’asseyait

posant son coude sur la table aux entailles

inscrit dans l’ordre universel.


Jean Follain

12. Une école d'autrefois, avec Maurice Fombeure (1906-1981) :


Les écoliers


Sur la route couleur de sable,

En capuchon noir et pointu,

Le 'moyen', le 'bon', le 'passable'

Vont à galoches que veux-tu

Vers leur école intarissable.


Ils ont dans leurs plumiers des gommes

Et des hannetons du matin,

Dans leurs poches du pain, des pommes,

Des billes, ô précieux butin

Gagné sur d'autres petits hommes.


Ils ont la ruse et la paresse

Mais l'innocence et la fraîcheur

Près d'eux les filles ont des tresses

Et des yeux bleus couleur de fleur,

Et des vraies fleurs pour leur maîtresse.


Puis les voilà tous à s'asseoir.

Dans l'école crépie de lune

On les enferme jusqu'au soir,

Jusqu'à ce qu'il leur pousse plume

Pour s'envoler. Après, bonsoir !


Maurice Fombeure ("Pendant que vous dormez" - Gallimard)

13. Pierre Gamarra (1919-2009) était écrivain ("Le maître d'école") et poète.

les textes ci-dessous sont extraits du recueil Mon Cartable et autres poèmes à réciter, illustré par Bernard Lafont, dans lequel on trouvera 36 poèmes pour les enfants.


Mon école


Mon école est pleine d'images,

pleine de fleurs et d'animaux,

mon école est pleine de mots

que l'on voit s'échapper des pages,

pleine d'avions, de paysages,

de trains qui glissent tout là-bas

où nous attendent les visages

des amis qu'on ne connaît pas.


Mon école est pleine de lettres,

pleine de chiffres qui s'en vont

grimper du plancher au plafond

puis s'envolent par les fenêtres,

pleine de jacinthes, d'oeillets,

pleine de haricots qu'on sème ;

ils fleurissent chaque semaine

dans un pot et dans nos cahiers.


Ma classe est pleine de problèmes

Gentils ou coquins quelquefois,

De chansons, de poèmes,

Dont on aime la jolie voix ;

Pleine de contes et de rêves,

Blancs ou rouges, jaunes ou verts,

De bateaux voguant sur la mer

Quand une brise les soulève.


Pierre Gamarra ("Mon Cartable et autres poèmes à réciter" - ID livre jeunesse, 2006)


Mon cartable


Mon cartable a mille odeurs,

mon cartable sent la pomme,

le livre, l’encre, la gomme

et les crayons de couleurs.


Mon cartable sent l’orange,

le bison et le nougat,

il sent tout ce que l’on mange

et ce qu’on ne mange pas.


La figue et la mandarine,

le papier d’argent ou d’or,

et la coquille marine,

les bateaux sortant du port.


Les cow-boys et les noisettes,

la craie et le caramel,

les confettis de la fête,

les billes remplies de ciel.


Les longs cheveux de ma mère

et les joues de mon papa,

les matins dans la lumière,

la rose et le chocolat.


Pierre Gamarra ("Mon Cartable et autres poèmes à réciter" - ID livre jeunesse, 2006)

14. Victor Hugo [1802-1885)  est un poète trop important pour ne pas être présent ici. Sur quel thème n'a-t-il pas écrit ? On devine déjà son regard d'enfant, poète critique, sur le monde, par les fenêtres de l' école.


Les enfants lisent, troupe blonde


Les enfants lisent, troupe blonde ;

Ils épellent, je les entends ;

Et le maître d'école gronde

Dans la lumière du printemps.


J'aperçois l'école entrouverte ;

Et je rôde au bord des marais ;

Toute la grande saison verte

Frissonne au loin dans les forêts.


Tout rit, tout chante ; c'est la fête

De l'infini que nous voyons ;

La beauté des fleurs semble faite

Avec la candeur des rayons.


J'épelle aussi moi ; je me penche

Sur l'immense livre joyeux ;

Ô champs, quel vers que la pervenche !

Quelle strophe que l'aigle, ô cieux !


Mais, mystère ! rien n'est sans tache.

Rien ! - Qui peut dire par quels noeuds

La végétation rattache

Le lys chaste au chardon hargneux ?


Tandis que là-bas siffle un merle,

La sarcelle, des roseaux plats,

Sort, ayant au bec une perle ;

Cette perle agonise, hélas !


C'est le poisson qui, tout à l'heure,

Poursuivait l'aragne, courant

Sur sa bleue et vague demeure,

Sinistre monde transparent.


Un coup de fusil dans la haie,

Abois d'un chien ; c'est le chasseur.

Et, pensif, je sens une plaie

Parmi toute cette douceur.


Et, sous l'herbe pressant la fange,

Triste passant de ce beau lieu,

Je songe au mal, énigme étrange,

Faute d'orthographe de Dieu.


Victor Hugo ("Les chansons des rues et des bois")

15. On retrouvera Kobayashi Issa (1763-1828) dans la catégorie HAÏKUS sur ce site (et toujours sur www.lieucommun.canalblog.com.

Voici un haïku d'école :


Haïku


Il mange des yeux sa récompense

Pour sa première calligraphie de l'an

Une orange


Issa

16. Francis Jammes (1868-1938) est l'auteur de "La Prière", poème chanté par Georges Brassens (voir la catégorie BRASSENS) et de "J'aime l'âne si doux" :

"J'aime l'âne si doux / marchant le long des houx. / Il a peur des abeilles /et bouge ses oreilles» ...

Qualifié parfois de "poète naturaliste", il porte une tendresse particulière à cet animal. Une autre de ses poésies, comme toute son oeuvre empreinte de mysticisme, s'intitule d'ailleurs "Prière pour aller au Paradis avec les ânes".


Ici, il s'agit de l'école  :


Souvenirs d'enfance (extrait)


J'allais chez Monsieur Lay l'instituteur.

Mon alphabet était comme des fleurs.

Je me souviens du poêle et de la bûche

Que chaque enfant du village apportait

Lorsque le ciel est une blanche ruche

Et qu'au réveil on dit : "Il a neigé !"

...

J'apprenais donc, mystère après mystère,

Toute la vie. Au champ de la rivière

J'étais certain que, pour varier les fleurs,

Tout simplement, quand on n'était pas là,

L'ange changeait les tiges, les couleurs.

Quel grand savant ne rirait de cela ?

...

Francis Jammes ("De l'angélus de l'aube à l'angélus du soir" - Mercure de France - cité par Pierre Menanteau dans son anthologie : "nouveau trésor de la poésie" - Sudel)

17. "L'école est fermée", pour retourner en vacances le temps d'un poème de Georges Jean (né en 1920) :


L'école est fermée


Le tableau s'ennuie ;

Et les araignées

Dit-on étudient

La géométrie

Pour améliorer

L'étoile des toiles :

Toiles d'araignées,

Bien évidemment.


L'école est fermée

Les souris s'instruisent,

Les papillons lisent

Les pupitres luisent,

Ainsi que les bancs.


L'école est fermée

Mais si l'on écoute

Au fond du silence,

Les enfants sont là

Qui parlent tout bas

Et dans la lumière,

Des grains de poussière,

Ils revivent toute l'année qui passa,

Et qui s'en alla …


Georges Jean

18. Créateur de poésies, de comptines, Pierre Lozère interprète aussi ses textes sur scène pour les enfants.
On peut retrouver ici : http://www.papaclown.com/
son programme.

Voici un texte sur le thème de l'école qu'on peut utiliser en comptine ou en chanson :


L'heure des mamans


C'est bientôt l'heure des mamans

préparez vous les enfants

il faut mettre ses habits

l'école est finie.


Devant l'école maternelle

les parents sont là

devant l'école maternelle

ils font les cent pas.


C'est bientôt l'heure des mamans

préparez vous les enfants

il faut mettre ses habits

l'école est finie.


Ma petite maman magique

dès que je te vois

je viens me blottir bien vite

au creux de tes bras.


C'est bientôt l'heure des mamans

préparez vous les enfants

il faut mettre ses habits

l'école est finie.


Pierre Lozère (texte de la chanson trouvée sur le CD "Papa Clown" - 1983 - 12 chansons au total).

19. Pierre Menanteau (1895-1992) est encore un enseignant qui a tourné poète.
Comme Jacques Charpentreau, il est l'auteur d'anthologies poétiques ("Florilèges"), dans lesquelles il s'attache à faire connaître les auteurs anciens et contemporains pour la jeunesse. Ses Oeuvres poétiques complètes en plusieurs tomes sont parues  aux Éditions Soc et Foc.

On trouvera Le premier vol de l'hirondelle, dans la catégorie POÉSIES pour la CLASSE niveau CYCLES 2 et 3.


Ici, l'école est buissonnière. Un exemple à ne pas suivre ?


À l'école du buisson


Marinette est à l'école.

Elle vole, vole, vole,

Sur les ailes d'un bourdon.

Vite on ouvre une fenêtre:

Un pinson alors pénètre

Sur des ailes de chanson.

Vite on ferme la fenêtre.

Mais l’œil voit l'escarpolette

D'une araignée au plafond.

Ah! l’écolière parfaite

Que vous êtes, Marinette,

À l'école du buisson !


Pierre Menanteau ("Oeuvres poétiques complètes" - tome V - Éd Soc et Foc)

20. Une comptine de Christian Merveille pour les petits, interprétée par cet auteur compositeur dans le CD Sur le bout des doigts (Éd Victor Mélodie - 2003) qui comprend 49 titres.


C'est la rentrée


Cartable nouveau,

Joli manteau.

Livres, cahiers

Et beau plumier ...

Cloche a sonné,

Un gros baiser,

Il faut y aller :

C'est la rentrée !


Christian Merveille ("Sur le bout des doigts")

21. Jean-Luc Moreau est né en 1937. Il a publié des histoires et des poèmes pour les enfants et les adolescents, (Sous le masque des mots, Devinettes, Poèmes de la souris verte … ) et des anthologies de poésie contemporaine ou plus classique (Poèmes à saute-mouton, Poèmes de Russie ...)


La cour de mon école


La cour de mon école

Vaut bien, je crois,

La cour de Picrochole,

Le fameux roi :

Elle est pleine de charme,

Haute en couleur;

On y joue aux gendarmes

Et aux voleurs;

Loin des Gaulois, des Cimbres

Et des Teutons,

On échange des timbres,

À croupetons;

Des timbres des Antilles,

De Bornéo…

Et puis on joue aux billes

Sous le préau.

Qu'on ait pris la Bastille,

C'est merveilleux,

Mais que le soleil brille,

C'est encor mieux !

Orthographe et problèmes

Sont conjurés.

École, ah ! que je t'aime

À la récré !


Jean-Luc Moreau


Voici un autre texte de Jean-Luc Moreau (déjà présent sur ce blog dans POÉSIES pour la CLASSE - CYCLES 2 et 3),
qui peut servir de base, par sa structure, à des jeux de création poétique.


Locataires


J'ai dans mon cartable

(C'est épouvantable !)

Un alligator

Qui s'appelle Hector.


J'ai dans ma valise


(Ça me terrorise !)

Un éléphant blanc

Du nom de Roland.


J'ai dans mon armoire

(Mon Dieu, quelle histoire !)

Un diplodocus

Nommé Spartacus.


Mais pour moi le pire,

C'est sous mon chapeau

D'avoir un vampire

Logé dans ma peau.


Jean-Luc Moreau


La rentrée


Un oiseau chantonne

Un air de Mozart

Que le vent d'automne

Emporte au hasard.

Bernard et Nicole,

La main dans la main,

Ont pris de l'école

Le joli chemin.

On voit sous les pommes

Crouler les pommiers.

Les crayons, les gommes

Sortent des plumiers.

Le ciel est morose :

Il verse des pleurs...

Mais Rosa-la-rose*

Est toujours en fleurs.


Jean-Luc Moreau

*allusion à la déclinaison latine de "rosa", que les élèves apprenaient au collège (cf la chanson de Jacques Brel : Rosa).

22. Carl Norac, poète belge né en 1960, est le fils de Pierre Coran (anagramme), dont vous trouverez une poésie sur l'école plus haut. Voici une nouvelle histoire à ranger dans le cartable de rentrée :


Poème du cartable rêveur


Pendant que tu étais

Sur la plage, cet été,

Ou bien dans la forêt,

As-tu imaginé

Que ton cartable rêvait ?

Il rêvait d’avaler

Des crayons, des cahiers,

Puis d’aller, comme on vole,

Sur le chemin de l’école.


Carl Norac

23. Voici des poésies de Jacques Prévert (1900-1977), sur le thème de l'école, présentes pour la plupart dans d'autres catégories (Cycle 3).
On trouvera ailleurs sur ce site une biographie plus détaillée de Prévert.


Le cancre


Il dit non avec la tête

Mais il dit oui avec le coeur

Il dit oui à ce qu'il aime

Il dit non au professeur

Il est debout

On le questionne

Et tous les problèmes sont posés

Soudain le fou rire le prend

Et il efface tout

Les chiffres et les mots

Les dates et les noms

Les phrases et les pièges

Et malgré les menaces du maître

Sous les huées des enfants prodiges

Avec des craies de toutes les couleurs

Sur le tableau noir du malheur

Il dessine le visage du bonheur.


Jacques Prévert ("Paroles")


Page d’écriture


Deux et deux quatre

Quatre et quatre huit

Huit et huit font seize

Répétez! dit le maitre

Deux et deux quatre

Quatre et quatre huit

Huit et huit font seize

Mais voilà l’oiseau lyre

Qui passe dans le ciel

L’enfant le voit

L’enfant l’entend

L’enfant l’appelle:

Sauve-moi

Joue avec moi

Oiseau!

Alors l’oiseau descend

Et joue avec l’enfant

Deux et deux quatre...

Répétez! dit le maitre

Et l’enfant joue

L’oiseau joue avec lui...

Quatre et quatre huit

Huit et huit font seize

Et seize et seize qu’est-ce qu’ils font?

Ils ne font rien seize et seize

Et surtout pas trente-deux

De toute façon

Et ils s’en vont.

Et l’enfant a caché l’oiseau

Dans son pupitre

Et tous les enfants

entendent sa chanson

et tous les enfants

entendent sa musique

et huit et huit à leur tour s’en vont

et quatre et quatre et deux et deux

à leur tour fichent le camp

et un et un ne font ni une ni deux

un et un s’en vont également.

Et l’oiseau lyre joue

Et l’enfant chante

Et le professeur crie:

Quand vous aurez fini de faire le pitre!

Mais tous les autres enfants écoutent la musique

Et les murs de la classe

S’écroulent tranquillement.

Et les vitres redeviennent sable

L’encre redevient eau

Les pupitres redeviennent arbres

La craie redevient falaise

Le porte-plume redevient oiseau.


Jacques Prévert ("Paroles")


En sortant de l'école


En sortant de l'école

nous avons rencontré

un grand chemin de fer

qui nous a emmenés

tout autour de la terre

dans un wagon doré


Tout autour de la terre

nous avons rencontré

la mer qui se promenait

avec tous ses coquillages

ses îles parfumées

et puis ses beaux naufrages

et ses saumons fumés


Au-dessus de la mer

nous avons rencontré

la lune et les étoiles

sur un bateau à voiles

partant pour le Japon

et les trois mousquetaires

des cinq doigts de la main

tournant ma manivelle

d'un petit sous-marin

plongeant au fond des mers

pour chercher des oursins


Revenant sur la terre

nous avons rencontré

sur la voie de chemin de fer

une maison qui fuyait

fuyait tout autour de la Terre

fuyait tout autour de la mer

fuyait devant l'hiver

qui voulait l'attraper


Mais nous sur notre chemin de fer

on s'est mis à rouler

rouler derrière l'hiver

et on l'a écrasé

et la maison s'est arrêtée

et le printemps nous a salués


C'était lui le garde-barrière

et il nous a bien remerciés

et toutes les fleurs de toute la terre

soudain se sont mises à pousser

pousser à tort et à travers

sur la voie du chemin de fer

qui ne voulait plus avancer

de peur de les abîmer


Alors on est revenu à pied

à pied tout autour de la terre

à pied tout autour de la mer

tout autour du soleil

de la lune et des étoiles

A pied à cheval en voiture

et en bateau à voiles.


Jacques Prévert ("Paroles")

24. Raymond Queneau (1903-1976) est un poète surréaliste (exclu de ce mouvement en 1930), co-fondateur de l' OULIPO (Ouvroir de Littérature Potentielle).

Il est l'auteur de Cent mille milliards de Poèmes, en 1961. Ce livre-objet est présenté ainsi par son auteur :
« Ce petit ouvrage permet à tout un chacun de composer à volonté cent mille milliards de sonnets, tous réguliers bien entendu. C’est somme toute une sorte de machine à fabriquer des poèmes, mais en nombre limité ; il est vrai que ce nombre, quoique limité, fournit de la lecture pour près de deux cents millions d’années (en lisant vingt-quatre heures sur vingt-quatre) ».

Cet ouvrage est réédité (Gallimard -1982).  On peut en avoir un aperçu actif ICI.

Raymond Queneau est aussi l'auteur de Zazie dans le métro (porté à l'écran en 1960 par Louis Malle), et d' Exercices de style (1947).


L’écolier


J’écrirai le jeudi* j'écrirai le dimanche*

quand je n'irai pas à l'école

j'écrirai des nouvelles j'écrirai des romans

et même des paraboles

je parlerai de mon village je parlerai de mes parents

de mes aïeux de mes aïeules

je décrirai les prés je décrirai les champs

les broutilles et les bestioles

puis je voyagerai j'irai jusqu'en Iran

au Tibet ou bien au Népal

et ce qui est beaucoup plus intéressant

du côté de Sirius ou d'Algol

où tout me paraîtra tellement étonnant

que revenu dans mon école

je mettrai l'orthographe mélancoliquement


Raymond Queneau ("Battre la campagne" - 1968)


* À l'école de Raymond Queneau, les écoliers se reposaient deux jours, le jeudi et le dimanche. Ce n'est que depuis 1972 que l'expression "la semaine des quatre jeudis" est devenue obsolète. On parle maintenant de la semaine de quatre jours, qu'il est question de généraliser ...peut-être. Les rythmes scolaires ? c'est une autre histoire ...


Un enfant a dit


Un enfant a dit

je sais des poèmes

un enfant a dit

chsais des poésies


Un enfant a dit

mon cœur est plein d'elles

un enfant a dit

par coeur ça suffit


Un enfant a dit

ils en savent des choses

un enfant a dit

et tout par écrit


Si l'poète pouvait

s'enfuir à tir-d'aile

les enfants voudraient

partir avec lui


Raymond Queneau ("L'Instant fatal")

25. Claude Roy (1915-1997), poète et romancier, a publié ce texte dans le recueil L’étonnement du voyageur 1987-1989 paru chez Gallimard en 1990. Il est l'auteur de nombreuses poésies pour les enfants. Quelques-unes sont présentes sur le site : L’oiseau voyou - L'escargot matelot - C'est tout un art d'être canard - La clef des champs - Les manières du soleil.


Voici deux autres textes de celui qui a écrit :


"Le poète n’est pas celui qui dit

Je n’y suis pour personne.

Le poète dit

J’y suis pour tout le monde."


Claude Roy - extrait de la poésie "Le Poète" (dans  "Paroles des Poètes d’aujourd’hui")


Quand nous étions enfants (titre proposé)


Quand nous étions enfants, pour que les lignes soient parfaitement droites on nous donnait de beaux cahiers quadrillés.


Quel repos de poser les mots un à un sur leur chemin bien sage tracé droit sur la page. Même si on fait encore des fautes d'orthographe les mots sont là tranquilles assis comme des chats.


Un sujet, un verbe, un complément direct, et le papier réglé beau comme des rails de train.


Plus tard, on écrit sur du papier tout blanc qui ressemble à la vie qu'ont les grandes personnes. Elles sont libres de faire ce qu'elles veulent. Il n'y a pas de ligne pour bien ranger les mots.


Claude Roy ("L’étonnement du voyageur")


L'enfant qui battait la campagne


Vous me copierez deux cents fois le verbe :

Je n'écoute pas. Je bats la campagne.


Je bats la campagne, tu bats la campagne,

Il bat la campagne à coups de bâton.


La campagne ? Pourquoi la battre ?

Elle ne m'a jamais rien fait.


C'est ma seule amie, la campagne.

Je baye aux corneilles, je cours la campagne.


Il ne faut jamais battre la campagne :

On pourrait casser un nid et ses oeufs.


On pourrait briser un iris, une herbe,

On pourrait fêler le cristal de l'eau.


Je n'écouterai pas la leçon.

Je ne battrai pas la campagne.


Claude Roy ("Enfantasques")


On pourra lire ICI une exploitation pédagogique de ce texte pour la création poétique, dans un CM2 : http://francastel.free.fr/battre%20la%20campagne.htm

26. Emprunté à Pierre Ruaud, s'il le veut bien
(voir son site : http://loufoquerie.free.fr/),
ce poème de rentrée :


Je voulais dans mon cartable


Je voulais dans mon cartable

Emporter mes châteaux de sable,

Mon cerf-volant, des coquillages

Et le portique de la plage.


Maman m’a dit :

"Ce n’est pas permis

Et puis tout ça

Ça ne rentre pas !"


Alors j’ai pris un beau stylo,

Pour le goûter quelques gâteaux

Et que des choses raisonnables.

Plus trois petits grains de sable !


Pierre Ruaud


Une comptine du même auteur :

C'est la récré


Mes doigts sont pleins de craie :

Le pouce est rouge

L'index est jaune

Le majeur est bleu

Et l'annulaire est vert.

L'auriculaire a su mieux faire :

Il est tout blanc !

Mes doigts sont pleins de craie,

Heureusement, c'est la récré.


Pierre Ruaud

27. Philippe Soupault (1897-1990) est un poète surréaliste et un romancier. Il a appartenu au mouvement Dada avec Louis Aragon et André Breton.


Grammaire


Peut-être et toujours peut-être

adverbes que vous m'ennuyez

avec vos presque et presque pas

quand fleurissent les apostrophes


Et vous points et virgules

qui grouillez dans les viviers

où nagent les subjonctifs

je vous empaquette vous ficelle


Soyez maudits paragraphes

pour que les prophéties s'accomplissent

bâtards honteux des grammairiens

et mauvais joueurs de syntaxe


Sucez vos impératifs

et laissez-nous dormir

une bonne fois

c'est la nuit

et la canicule


Philippe Soupault  ("Poésies complètes" - Édit Guy Lévis Mano - 1937)

28. Jules Supervielle (1884-1960), poète partagé entre la Pampa uruguayenne où il est né, et la France, est resté à l'écart du grand mouvement surréaliste, pour une poésie du quotidien mystérieux.


Mathématiques


Quarante enfants dans une salle,

Un tableau noir et son triangle,

Un grand cercle hésitant et sourd

Son centre bat comme un tambour.


Des lettres sans mots ni patrie

Dans une attente endolorie.


Le parapet dur d'un trapèze,

Une voix s'élève et s'apaise,

Et le problème furieux

Se tortille et se mord la queue.


La mâchoire d'un angle s'ouvre.

Est-ce une chienne ? Est-ce une louve ?


Et tous les chiffres de la terre,

Tous ces insectes qui défont

Et qui refont leur fourmilière

Sous les yeux fixes des garçons*.


Jules Supervielle ("Gravitations" - 1925).
*L'école de Supervielle n'était pas encore mixte.

29. Paul Vincensini (1930-1985), qui se définissait lui-même comme «archiviste du vent» (le recueil «Archiviste du Vent au cherche midi éditeur, est paru en 1986, un an après sa disparition) s’est réfugié dans la poussière du temps.
Il a sa page sur ce site et surtout un site entier lui est dédié, très complet, que gèrent ses enfants avec rigueur et tendresse : http://verlaine06.chez-alice.fr/biblio.htm

Quelques unes de ses nombreuses poésies sont présentes aussi dans la catégorie POÉSIES pour la CLASSE - CYCLES 2 et 3.

Voici son école :


Un enfant veut répondre


Un enfant veut répondre

Il a levé le doigt

Dans une vieille école

Qui n'existe plus.

La neige a fondu sous les bancs

Il fait chaud comme à l'écurie

Et l'instituteur

A souligné tous les verbes à la craie bleue.

L'enfant qui veut répondre

Fait claquer ses doigts

Tachés d'encre violette

Dans la vieille école

Qui n'existe plus.


Paul Vincensini ("Le point mort" - Editions Chambelland - 1969)

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