PRINTEMPS DES POÈTES 2009   -  En rires
textes en français et création poétique
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PRINTEMPS DES POÈTES 2009 - L’HUMOUR - textes en français avec suggestions de CRÉATION POÉTIQUE

par auteurs D  -  E  -  F

les textes accompagnés de fiches de création poétique
sont indiqués par [+ CRÉATION]


et cette vignette signale des exploitations possibles

TEXTES D’AUTEURS  D  E  F


Yvan Dautin : La méduse / Les mains dans les poches

Luc Decaunes : Le porc-épic / Le tamanoir n'est pas bien vu / Proverbes [+ CRÉATION]

Lise Deharme : L'horloger / La poule noire / La plume

Lucie Delarue-Mardrus : Mauvaise rencontre / Petites souris / Problème / Le chat noir / Les poissons rouges / Les vaches / Le cochon

Marc Delouze : Le tambourin / La grosse caisse

Henri Dès : Avec les copains / La marche des chapeaux

Robert Desnos : Le canapé de Paméla / Chant du ciel / Le souci / C'était un bon copain / L'hippocampe / Les hiboux / Le pélican / Le blaireau / La fourmi   [+ CRÉATION] / La dame pavot nouvelle épousée / Par un point situé sur un plan... / L'oiseau du Colorado / Le poisson sans-souci / Demi-rêve [+ CRÉATION]

Jean-Pierre Develle : Qu'est-ce qui ne va pas sur la terre ?

Michel Deville : Sabotage / Tristan et Yseut / Mots croisés / Lorsque et si .../ Le vieux cheval / Le chat chinois

Maurice Donnay : Le serpent et le cor de chasse

Paul Éluard : Sur la maison du rire / Dans Paris [+ CRÉATION]

Pierre Ferran : Le cinquième jour / Comptine des canards sauvages

Maurice Fombeure : Chanson de la pluie / Air de ronde

Xavier Forneret : Un pauvre honteux

Georges Fourest : Le Cid / Sardines à l'huile

André Frédérique : Exercices de logique [+ CRÉATION] / Seconde classe / La face

 

- Yvan Dautin -

Yvan Dautin, poète-chanteur, est né en 1945. Il se joue des mots, les mets en scène. L'humour, l'amour et le désamour sont ici et là dans ses textes poétiques. Deux textes imagés, surprenantes scènes surréalistes, ci-dessous pour Le Printemps des Poètes 2009.

Voyez le blog http://yvandautin.canalblog.com/


Les mains dans les poches sous les yeux
Tel un Picasso de banlieue ...


La méduse

La méduse de la plage de Saint-Malo
Fait du vélo sur la plage à Saint-Malo
Les coquillages et les crustacés
En ont assez de se faire écraser

Sous les rayons d'un vélo majuscule
Et d'une méduse qui vous tentacule
Ouille, ouille, ouille !
C'est là qu'il faut pas s'en méli-mélo les pinceaux
Dans la chaîne de vélo...
Je continue

La méduse de la plage de Saint-Malo
Fait du vélo sur la plage à Saint-Malo
Elle en pince pour un crabe
Elle en pince pour un crabe
Fabricant de chateaux de sable
Mais qui recule dès qu'il la voit

Alors la méduse de Saint-Malo fait du mélo
Sur la plage de Saint-Malo
A pied, à ch'val, en voiture et à vélo
Les coquillages et les crustacés
En ont assez de se faire écraser

Sous les rayons d'un vélo majuscule
Et d'une méduse qui vous tentacule
Ouille, ouille, ouille !
C'est là qu'il faut pas s'en méli-mélo les pinceaux
Dans la chaîne de bicyclette...
Je continue

La méduse de la plage de Saint-Malo
Fait du mélo sur la plage à Saint-Malo
C'est alors qu'un vieux dromadaire
Qui passait par là en lisant son bréviaire
Et on ne sait trop ce qui se passa
Mais le dromadaire devint papa, ah !

Une méduse un peu volage à Saint-malo
Qui fait du vélo sur la plage à Saint-Malo
Les coquillages et les crustacés
En ont assez de se faire écraser

Sous les rayons d'un vélo majuscule
Et d'une méduse qui vous tentacule
Ouille, ouille, oh, oh, oh, trop tard !
C'est déjà fait, ouh, ouh, ouh, ah, ah !

Yvan Dautin (paroles et musique)

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Les mains dans les poches

Les mains dans les poches sous les yeux
Tel un Picasso de banlieue
Trempe tes pinceaux dans la débine
Si le monde est beau, toi, t'as mauvaise mine

Sur le trottoir des Deux Magots
Tu fais Prévert, tu fais Rimbaud
Tu fais désert, tu fais chameau
Tu vends au noir des esquimaux

Les mains dans les poches sous les yeux
Tel un Picasso de banlieue
Tu croûtes et tu peins, toi, l'anonyme
Le dernier mégot, comme on fait cantine

Près du comptoir qui rit, qui pleure
Un homme saoul fait l'ascenseur
Le vieil hibou berce les coeurs
Quand y en a marre, salut, c'est l'heure

Les mains dans les poches sous les yeux
Tel un Picasso de banlieue
Trempe tes pinceaux dans la débine
Si le monde est beau, toi, t'as mauvaise mine

Sur le trottoir des Deux Magots
Y avait Prévert
Y avait Rimbaud

Tout est désert, pas un chameau
Bonjour, bonsoir, les esquimaux

Yvan Dautin (paroles et musique)

- Luc Decaunes - et proverbes

Luc Decaunes (1913-2001), instituteur et journaliste français, était écrivain, biographe ("Les idées noires" , "Vie de Paul Éluard"...) et poète ("Le feu défendu", "Récréations", "Le cœur légendaire"...).
Sans appartenir lui-même réellement au Mouvement surréaliste, il était proche d'Éluard, Aragon, Tzara.

Du recueil Chansons pour un bichon, qui comprend 60 chansons pour enfants (dont Luc Decaunes a écrit également la musique) qu'on peut considérer comme des poèmes, voici deux titres :

Le porc-épic (chanson)

Avez-vous vu le porc-épic
Qui se baladait place du Trône ?
Avez-vous vu le porc-épic
Qui remontait la rue Lepic ?
Pic pic pic !
Dit le porc-épic,
Je ne pique pas, ma parole !
Pic pic pic !
Dit le porc-épic,
Je ne pique pas les aspics !

Luc Decaunes ("Chansons pour un bichon" - Éditions Seghers, 1979 et réédition 1999)

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Le tamanoir n'est pas bien vu (chanson)

Refrain :
Non !
Je ne veux pas vous voir,
Monsieur le Tamanoir !

I
Dans notre ferme il est un chien
Qui sent mauvais, qui ne vaut rien ;
Chacun se sauve quand il vient.
Moi... je l'appelle mon copain.

II
Dans la montagne il est un loup
Avec des yeux comme des trous
Et le cœur dur comme caillou
... À qui j'ai donné rendez-vous.

III
Dans la rivière est un poisson
Qui ne mord pas les hameçons,
Seulement les petits garçons.
... On est amis comme cochons !

IV
Et dans mon lit sont des souris
Rongeant mes pieds à petits cris.
... Je leur apporte chaque nuit
Du bon fromage et du pain bis.

V
J'ai rencontré un éléphant,
Trompe terrible et grandes dents,
Qui fait peur à tous les enfants !
... Il a mon cœur, ce bon géant.

Luc Decaunes ("Chansons pour un bichon" - Éditions Seghers, 1979 et réédition 1999)

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Dans son recueil "Récréations" (Éditions Rougerie, 1977), Luc Decaunes s'est amusé à détourner des proverbes, des dictons.
En voici quelques-uns, choisis parmi les plus "convenables". Le jeu pour les élèves consiste à retrouver le proverbe initial :

Proverbes

Il n'y a pas de fusée sans queue.

Qui va en classe, perd sa grâce.

L'ennui porte conseil.

Il y a loin de la poule au lièvre.

Plus on a de poux, plus on vit.

Un bon chien vaut mieux que deux rats.

Tel blair, tel pif.

Qui trop embrase mal éteint *.

Luc Decaunes ("Récréations" - Éditions Rougerie, 1977)

* On trouve ce dernier proverbe dans un album du "Chat" de Philippe Geluck, les grands spirituels se rencontrent.


Détournement de proverbes, de dictons

Répertorier des dictons et des proverbes, dans lesquels on remplacera certains noms ou verbes par des mots de sonorités approchantes, en gardant la construction initiale. C'est encore mieux si le proverbe prend un nouveau sens, amusant (comme plusieurs dans la liste ci-dessus).

Exemples classiques (ou presque) :

Ne remets jamais à deux mains ce que tu peux faire avec une seule.
Un seul hêtre vous manque et tout est des peupliers (attribué à Raymond Queneau).
À vaincre sans baril, on triomphe sans boire.

 

Une variante consiste à ne modifier que la fin du proverbe, pour provoquer une surprise. marquer un temps d'arrêt avant la "chute".

Exemples :
Neige en novembre... Noël en décembre.
C'est au pied du mur qu'on voit le mieux... le mur (JM Bigard).
On a souvent besoin de petits pois chez soi (ancienne publicité) 

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Exemples d'un autre auteur, Guy de la Mothe ("Jeu des proverbes travestis", dans "Notes en marge") :

Jamais deux sans trois >  Jamais deux sans toi.
À quelque chose malheur est bon >  À quelque rose bonheur est bon.
Mon verre n'est pas grand mais je bois dans mon verre >  Mon rêve n'est pas grand mais je bois dans mon rêve.

variante proposée par le blog  : Mon rêve n'est pas grand mais je crois dans mon rêve.

- Lise Deharme -

Lise Deharme (1907-1981), est une romancière et poétesse française, proche des Surréalistes.

L'horloger

La petite bête
Qui est dans la montre
Je l’entends gratter
Je l’entends taper
Je l’entends sonner
Que dit-elle ? Tic-tac
Tic-tac-tic

La petite bête
Est morte ce soir
Monsieur l’horloger
Veux-tu la retrouver
Veux-tu la ramener
Ma petite bête.
Ne veut plus chanter

La petite bête
Monsieur l’horloger
Me l’a retrouvée
Elle était coincée
Par un grain de blé
Que dit-elle ? Tic-tac
Tic-tac-tic

Lise Deharme ("Le coeur de Pic" -  photographies de Claude Cahun - éditions Corti, 1937 et Éditions MeMo, 2004)

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La poule noire

La poule noire
dans le potager
a crié
comme une enragée.
Les fermiers
sont allés la voir ;
elle a dit qu'il allait pleuvoir.
on ne l'a pas crue lanturlu,
et mon beau chapeau est perdu !


Lise Deharme ("Cahiers de curieuse personne" - éditions des Cahiers libres, 1933)

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La plume

Une plume est tombée
par terre.
Va la ramasser.
- Pour quoi faire ?
Il va pousser un plumier.

Lise Deharme ("Le coeur de Pic" -  photographies de Claude Cahun - éditions Corti, 1937 et Éditions MeMo, 2004)


- Lucie Delarue-Mardrus -

Lucie Delarue-Mardrus (1874-1945) a écrit de nombreux poèmes, romans, contes et nouvelles.
Elle était aussi dessinatrice, sculptrice et historienne.

Notre recueil référence est "Poèmes mignons pour les enfants". C'est de cet ouvrage que sont tirés tous les poèmes ci-dessous.

Mauvaise rencontre

Antoine Lenoir dans le noir
Monte l'escalier sans y voir.
Henri Leborgne qui le lorgne
Soudain d'un coup de poing l'éborgne.
" Oh ! oh ! " dit Lenoir
" Hi ! hi ! " dit Leborgne.
- Répondez Lenoir
Fait-il toujours noir,
Ou vos marches s'allument-elles
Au clair de trente-six chandelles ? "

Lucie Delarue-Mardrus (ouvrage cité)

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Petites souris

C’est la petite souris grise,
Dans sa cachette elle est assise.
Quand elle n’est pas dans son trou,
C’est qu’elle galope partout.

C’est la petite souris blanche
Qui ronge le pain sur la planche.
Aussitôt qu’elle entend du bruit,
Dans sa maison elle s’enfuit.

C’est la petite souris brune
Qui se promène au clair de lune,
Si le chat miaule en dormant,
Elle se sauve prestement.

C’est la petite souris rouge,
Elle a peur aussitôt qu’on bouge !
Mais, lorsque personne n’est là,
Elle mange tout ce qu’on a.

Lucie Delarue-Mardrus (ouvrage cité)

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Problème

On coupe deux pommes en quatre,
Combien cela fait-il de quarts ?

Hélas ! Au lieu de me débattre,
J'aimerais mieux manger les parts !

Lucie Delarue-Mardrus (ouvrage cité)

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Le chat noir

J'ai dans ma cave un chat noir.
Ses yeux sont de couleur claire.
Mais s'il les ferme, bonsoir !
Pour le trouver, rien á faire !

Lucie Delarue-Mardrus (ouvrage cité)

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Les poissons rouges

- Les poissons rouges du bocal
Ont de l'eau par-dessus la tête.
Cela ne leur fait donc pas mal ?

- Bien sûr que non, petite bête !
Vois s'ils sont vifs et déliés !
C'est dans l'air qu'ils seraient noyés.

Lucie Delarue-Mardrus (ouvrage cité)

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Les vaches

Quand je traverse le terrain,
Les vaches des fermes modèles,
Pourquoi donc me regardent-elles ?
Pourtant je ne suis pas un train !

Lucie Delarue-Mardrus (ouvrage cité)

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Le cochon

- Pourquoi marche-t-il, le cochon,
Si fier à travers la prairie ?

- C'est qu'à lui tout seul, des pieds au front,
Il est une charcuterie.

Lucie Delarue-Mardrus ("Poèmes mignons pour les enfants" - Gedalge, 1929)

- Marc Delouze -

Marc Delouze est né en 1945.
Extraits de sa biographie sur le site du Printemps des Poètes :
Son premier recueil paraît en 1971. Quelques années plus tard, se refusant à "faire le poète", il s'installe dans un silence éditorial d'une vingtaine d'années, pendant lesquelles il travaille à la recherche de nouveaux supports d'expression poétique liés à la Cité : spectacles de rue, poésie musicale, interventions diverses...et, en 1982, il crée l'association "Les Parvis Poétiques", qui organise des événements, des festivals, des expositions sonores, des lectures-spectacles, etc.
Dernière publication en date : "C'est le monde qui parle" (récit - éditions Verdier, 2007).

Marc Delouze a mis en poèmes animaux les instruments de musique, en voici deux :

Le tambourin

Chitiki le kangourou
a volé plein de grelots
se karapatte à grands sauts
mais son ventre fait un bruit
à réveiller les nuages
Chitiki Chitiki
Chitiki le kangourou
n'est pas surpris

IL EST SOURD

Marc Delouze

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La grosse caisse

Tontakès
le dinosaure
patatauge
dans la gadoue
puis il s'essore
comme un torchon

À PATTES

Marc Delouze

- Henri Dès -


Henri Dès, né en 1940, un chanteur connu des enfants.
Il est même passé à l'Olympia (la preuve en image avec le CD ci-dessus).
Plus de 20 albums.

Le site officiel du chanteur, où on peut écouter des extraits de tous les titres, rangés par album, et imprimer est ici :
http://www.henrides.net/

On trouve une sélection de textes (31) avec partition, ici :
http://perso.orange.fr/partitions/primaire/des/des.htm


Voici le début d'une chanson extraite du CD Les bêtises (photo):

Avec les copains

On aime bien avec les copains
Aller faire un tour dans le bois tout près.
On y passe l'après-midi
On fait les malins
On est comme des fous.

On aime bien avec les copains
Aller faire un tour en forêt
On y passe l'après-midi
La forêt elle est rien qu'à nous.

On prend des fusils de chasse
Bout de bois sur un bout d'tuyau
On se frotte la figure
Les deux mains trempées dans de la boue.

On dit qu"on part à la chasse
Dans le pays des zozos
Ça nous fait une drôle d'allure
Y a des loups garous partout ...

Henri Dès (CD "Les bêtises" - Disques Mary Josée, 1999)

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Un deuxième texte, extrait d'un autre disque :

La marche des chapeaux

Quand je mets mon chapeau gris
C'est pour aller sous la pluie

Quand je mets mon chapeau vert
C'est que je suis en colère
Et je mets mon chapeau mou
Quand ça ne va plus du tout

Quand je mets mon galurin
C'est pour aller au jardin

Quand je mets mon chapeau bleu
C'est que ça va déjà mieux
Et je mets mon chapeau blanc
Quand je suis très content

Quand je mets mon p'tit béret
C'est pour aller au muguet

Et je mets mon chapeau rond
Pour aller aux champignons
Avec une plume au bout
C'est pour aller partout

Quand je mets mon grand chapeau
C'est pour jouer du piano

Quand je mets ma p'tite casquette
C'est pour jouer d'la trompette
Et je mets mon capuchon
Pour jouer du violon

Henri Dès (dans le disque "Flagada" -  Disques Mary Josée, 2005)

- Robert Desnos -

Robert Desnos (1900-1945) a fait partie avec Benjamin Péret et André Breton du mouvement Dada et du  surréalisme. Il rompra plus tard avec eux. Auteur de nombreux textes poétiques, ses poèmes pour les enfants sont très connus ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, 1952).

"Je suis un acrobate de fortune
qui termine son numéro
dans l'exacte nuance de dérisoire."
Robert Desnos, poème "Identité"

Des textes de Desnos sont déjà présents sur le blog dans les catégories C2 et C3 pour la classe (La fourmi - Le pélican - L'escargot - La grenouille aux  souliers percés - Les hiboux - Le zèbre - L'oiseau du Colorado - Il était une feuille). Une autre série de textes, souvent plus graves*, sont rangés dans la catégorie du "Printemps des Poètes  2008 : l'Autre"  - *voir le complément à la biographie de Desnos dans cette catégorie. 

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Ce poème joue sur les échanges de lettres ou de syllabes,  à la manière (mais sans l'intention grivoise évidemment), de contrepèteries, et l'invention de mots :

Le canapé de Paméla

Le canapé de Paméla
Le Panapé de Caméla
Le Panala de Camépé

Est un beau canaquois
Est un nabeau est un naquois
Charmante Panapé
Charmante Paméla

Le charme de Paméla
Le charme du canapé
Il est passé par ici
Il repassera par là
C’est un nabeau c’est un naquois
Charmante Paméla
Délicieux canapé

Robert Desnos ("Youki 1930 Poésie" - publication posthume dans "Destinée arbitraire" - Gallimard, 1975)


Jouer avec les syllabes

Les élèves peuvent rechercher des mots connus dans le dictionnaire en suivant, comme dans le poème de Robert Desnos, certains critères : le même nombre de syllabes et des voyelles communes, ou pas. Ils s'exercent à la permutation simple de syllabes entre deux mots, et en vérifient le possible effet amusant. On construit ensuite autour des mots appariés un texte structuré, en enrichissant le thème développé, sur le mode humoristique.

L'exemple  ci-dessous, avec des prénoms et quelques entorses à la règle pour rester dans le thème choisi est déjà placé au paragraphe Jacques Charpentreau :

Mes trouvailles 

J'ai cueilli des radis pour Annie
des rideaux et des radeaux pour Anna ...
(texte complet au paragraphe Charpentreau)

On retrouvera avec d'autres auteurs [Boby Lapointe par exemple] d'autres procédés basés sur les jeux de mots.
Voir également "La Belle Lisse Poire du prince de Motordu" de Pef, ainsi que les autres livres de la série, et le "Dictionnaire des mots tordus ", du même auteur.

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Dans le texte qui suit, on observera l'emboîtement des vers. Seule la partie en couleur de ce texte est proposée en élémentaire.

Chant du ciel

La fleur des Alpes disait au coquillage : « tu luis »
Le coquillage disait à la mer : « tu résonnes »
La mer disait au bateau : « tu trembles »
Le bateau disait au feu : « tu brilles »
Le feu me disait : « je brille moins que ses yeux »
Le bateau me disait : « je tremble moins que ton coeur quand elle paraît »
La mer me disait : « je résonne moins que son nom en ton amour »
Le coquillage me disait : « je luis moins que le phosphore du désir dans ton rêve creux »
La fleur des Alpes me disait :« elle est belle »
Je disais : « elle est belle, elle est belle, elle est émouvante ».

Robert Desnos ("Corps et biens", les ténèbres - Gallimard,1930 et Poésie/Gallimard, 1968)

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Dans celui-ci, l'humour est sujet du poème :

Le souci

Et pour qui sont ces six soucis ?
Ces six soucis sont pour mémoire.
Ne froncez donc pas les sourcils,
Ne faites donc pas une histoire,
Mais souriez, car vous aussi,
Vous aussi, aurez des soucis.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

[La première édition réunit les recueils Chantefables (1944*) et Chantefleurs (1952)  ainsi que des jeux de langages, des "poèmes à dire, à chanter, à danser", que Robert Desnos avait écrits pour les enfants de ses amis pendant l'occupation. La préface est de sa compagne, Youki, et les textes sont illustrés par  Gabrielle Sauvain.] source : www.marelibri.com *Robert Desnos a été arrêté en 1944 et déporté, avant d'avoir vu la parution de "Chantefables".

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C'était un bon copain

Il avait le cœur sur la main
Et la cervelle dans la lune
C'était un bon copain
Il avait l'estomac dans les talons
Et les yeux dans nos yeux
C'était un triste copain
Il avait la tête à l'envers
Et le feu là où vous pensez
Mais non quoi il avait le feu au derrière
C'était un drôle de copain
Quand il prenait les jambes à son cou
Il mettait son nez partout
C'était un charmant copain
Il avait une dent contre Étienne
A la tienne Étienne à la tienne mon vieux
C'était un amour de copain
Il n'avait pas la langue dans sa poche
Ni la main dans la poche du voisin
Il ne pleurait jamais dans mon gilet
C'était un copain
C'était un bon copain.

Robert Desnos ("Corps et biens" - Gallimard,1930 et Poésie/Gallimard, 1968)

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L’hippocampe

Gloire, gloire au bel hippocampe,
Cheval marin, cheval de trempe,
Qu’aucun jockey n’a chevauché,
Hip ! Hip ! Hip ! pour l’hippocampe.

Gloire ! Gloire au bel hippocampe,
Dans une poche, sur son ventre,
Il porte et il couve ses œufs.
Là, ses petits sont bien chez eux.
Hip ! Hip ! Hip ! pour l’hippocampe.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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Les hiboux

Ce sont les mères des hiboux 
Qui désiraient chercher les poux 
De leurs enfants, leurs petits choux, 
En les tenant sur les genoux.

Leurs yeux d'or valent des bijoux 
Leur bec est dur comme cailloux, 
Ils sont doux comme des joujoux, 
Mais aux hiboux point de genoux !

Votre histoire se passait où ?
Chez les Zoulous ? Les Andalous ? 
Ou dans la cabane bambou ? 
A Moscou ? Ou à Tombouctou ? 
En Anjou ou dans le Poitou ? 
Au Pérou ou chez les Mandchous ?

Hou ! Hou ! 
Pas du tout, c'était chez les fous.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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Le pélican

Le capitaine Jonathan,
Étant âgé de dix-huit ans
Capture un jour un pélican
Dans une île d'Extrême-orient,

Le pélican de Jonathan
Au matin, pond un oeuf tout blanc
Et il en sort un pélican
Lui ressemblant étonnamment.

Et ce deuxième pélican
Pond, à son tour, un oeuf tout blanc
D'où sort, inévitablement
Un autre, qui en fait autant.

Cela peut durer pendant très longtemps
Si l'on ne fait pas d'omelette avant.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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Le blaireau

Pour faire ma barbe 
Je veux un blaireau, 
Graine de rhubarbe, 
Graine de poireau.

Par mes poils de barbe ! 
S'écrie le blaireau, 
Graine de rhubarbe, 
Graine de poireau,

Tu feras ta barbe 
Avec un poireau, 
Graine de rhubarbe, 
T'auras pas ma peau.

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)

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<< ci-dessus, fourmi au feutre indélébile sur fond  gouache et huile et fourmi en volume constituée de segments liés.
echniques d’art plastique visibles sur le blog
http://jourssemisentre2.canalblog.com/

La fourmi

Une fourmi de dix-huit mètres
Avec un chapeau sur la tête,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi traînant un char
Plein de pingouins et de canards,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi parlant français;
Parlant latin et javanais,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Eh ! Pourquoi pas ?

Robert Desnos ("Chantefables et Chantefleurs" - Gründ éditeur, publication posthume en 1952)


À la manière de "une fourmi de dix-huit mètres ..."

voici une adresse où vous trouverez des textes imités de "La fourmi" : http://clicnet.swarthmore.edu/rire/textes/desnos.html

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La dame pavot nouvelle épousée

La dame pavot nouvelle épousée
a demandé à son mari
Quelle est l'année ?
Quel est le mois ?
Quelle est la semaine ?
Quel est le jour ?
Quelle est l'heure ?
Et son mari a répondu
- Nous sommes en l'an quarante
nous sommes au mois de Juillobre
semaine des quatre jeudis
jour de gloire
midi sonné.
Belle année, agréable mois,
charmante semaine,
jour merveilleux
Heure délicieuse.

Robert Desnos ("Le parterre d'Hyacinthe" publication posthume dans "Destinée arbitraire" - Gallimard, 1975).

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Par un point situé sur un plan...

Par un point situé sur un plan
On ne peut faire passer qu'une perpendiculaire
à ce plan.
On dit ça...
Mais par tous les points de mon plan à moi
On peut faire passer tous les hommes, tous les animaux de la terre
Alors votre perpendiculaire me fait rire.
Et pas seulement les hommes et les bêtes
Mais encore beaucoup de choses
Des cailloux
Des fleurs
Des nuages
Mon père et ma mère
Un bateau à voiles
Un tuyau de poêle
Et si cela me plaît
Quatre cents millions de perpendiculaires.

Robert Desnos ("La géométrie de Daniel" 1939 - publié aux éditions Gallimard dans "Destinée arbitraire", en 1975)

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L'oiseau du Colorado

L’oiseau du Colorado
Mange du miel et des gâteaux
Du chocolat et des mandarines
Des dragées des nougatines
Des framboises des roudoudous
De la glace et du caramel mou.

L’oiseau du Colorado
Boit du champagne et du sirop
Suc de fraise et lait d’autruche
Jus d’ananas glacé en cruche
Sang de pêche et navet
Whisky menthe et café.

L’oiseau du Colorado
Dans un grand lit fait un petit dodo
Puis il s’envole dans les nuages
Pour regarder les images
Et jouer un bon moment
Avec la pluie et le beau temps.

Robert Desnos ("La ménagerie de Tristan" publié dans "Destinée arbitraire" -  Poésie Gallimard, 1975)

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Le poisson sans-souci (extrait)

Le poisson sans-souci
Vous dit bonjour vous dit bonsoir
Ah ! qu’il est doux qu’il est poli
Le poisson sans-souci.

Il ne craint pas le mois d’avril
Et tant pis pour le pêcheur
Adieu l’appât adieu le fil
Et le poisson cuit dans le beurre.

[...]

Le poisson sans-souci
Qui dit bonjour qui dit bonsoir
Ah ! qu’il est doux et poli
Le poisson sans-souci
Le souci sans souci
Le Poissy sans Soissons
Le saucisson sans poids
Le poisson sans-souci.

Robert Desnos ("La ménagerie de Tristan" publié dans "Destinée arbitraire" -  Poésie Gallimard, 1975)

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Les passages du poème qui suit sont semblables à des bribes d'images au sortir d'un rêve qu'on ne parvient pas à reconstituer. Des collages de mots, un bout de phrase ...

Demi-rêve (extrait)

abougazelle élaromire
Elaroseille a la mijelle
a la mirate a la taraise

[...]

Il est bonjour au coeur de lune
Le ciel alors lagélami
Lagélasou lagésommeil
Lagébonneil Légésonjour.

Robert Desnos ("Destinée arbitraire" -  Poésie Gallimard, 1975)


Inventer des mots : Les mots inventés ici  par Robert Desnos sont choisis pour leur sonorité, leur pouvoir d'évocation, et pour le rythme du poème.

On peut obtenir un effet approchant en partant d'un poème court , existant ou original, et en remplacer la plupart des mots par des associations de syllabes aux sonorités plaisantes.

Voir Guillevic, Boby Lapointe, Boris Vian.

 

- Jean-Pierre Develle -

Jean-Pierre Develle est un auteur contemporain. Ce texte a été trouvé dans le recueil du Concours de poésie de la RATP :

Qu’est-ce qui ne va pas sur la terre ?

C’est le chat, dit la souris
C’est le lion, dit la gazelle
C’est le loup, dit l’agneau
C’est l’homme, dit l’homme

Jean-Pierre Develle ("Des rimes et des rames" - recueil de textes du concours Concours de poésie dans le métro 2002-2003, éditions de la Voûte)

- Michel Deville -


Michel Deville est né en 1931. C'est un cinéaste connu : Un Monde presque paisible, La Maladie de Sachs, Benjamin ou les Mémoires d’un puceau, Péril en la demeure, le Dossier 51, La Lectrice
C'est aussi un poète, moins connu, auteur de huit recueils au Cherche-midi éditeur : Rien n'est sûr, Poézies, Mots en l'air, L'Air de rien ...

Sabotage

Ils avaient fabriqué
Un chat botté,
Mais mal  :
Il zézayait,
Leur animal.

Moralité :
Le saboté.

Michel Deville ("Poèmes zimpromptus", éditions Saint-Germain-des-Prés, 1984)

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Tristan et Yseut


- Parle-moi, dit Yseut à Tristan.
- Je t'aime, dit Tristan à Yseut.
- Je sais. Mais c'est tout ? demanda Yseut.
- Je t'aime beaucoup, répondit Tristan.
- Mais encore ? insista Yseut.
- Je t'adore, ajouta Tristan.
- C'est attristant, pensa Yseut.

Michel Deville ("Mots en l'air" 1993)

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Un autre clin d'oeil :

Mots Croisés

Les grands seigneurs, les chevaliers,
Les grands prélats ou de moins grands
Et la cohorte des manants
En route vers Jérusalem
S'arrêtaient le soir, harassés.
Certains écrivaient des poèmes,
D'autres, toujours l'amour des mots,
Devant les grilles des châteaux
Jouaient à un jeu
Baptisé
En souvenir d'eux
Mots croisés.

Michel Deville ("les Croisades")

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Un texte à la manière de Rudyard Kipling ("Tu seras un homme mon fils", voir plus bas ) ...

Lorsque et si ...

Lorsque l'on tremble encore à l'approche de l'autre,
Lorsque le doute encore est infiniment nôtre,
Lorsque les intuitions sont approximatives,
Lorsque devient l'humeur, pour un rien, agressive,
Lorsque la main est moite et le regard crétin,
Lorsque le tutoiement est encore incertain,
Lorsqu'on éclate en pleurs pour une peccadille,
C'est qu'on est amoureux, ma fille.

Si tu ne trembles plus, si tu n'as plus de doute,
Si ton humeur est droite ainsi qu'une autoroute,
Si galante est ta main
Et ton regard câlin,
Si tu en viens au tu sans tergiversation,
Si tu ne pleures plus avec obstination,
Si tu tires la langue à toute ta famille,
Tu seras un homme, ma fille.

Michel Deville ("Rien n'est sûr")

Voici le poème original, que Rudyard Kipling, a écrit "If ..." (Si ...), en 1910. C'est la version traduite de l'anglais par l'écrivain Pierre Maurois (en 1918), qui est généralement retenue :

Tu seras un Homme, mon Fils (autre titre : Si ...)

Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.

Rudyard Kipling   (Bernard Lavilliers l'a mis en musique et interprété (1988).

Pour les amateurs, il existe d'autres traductions de la poésie de Kipling, la dernière de 2006 !

Voyez plutôt ici : http://www.crescenzo.nom.fr/kipling.html

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Le vieux cheval

On le fit galoper,
Il galopa,
Puis on le fit marcher
(Au pas au pas),
Ensuite on exigea
Qu'il voulût bien trotter,
Mais là, tout net, il refusa
Et laconique, il expliqua :
- Trot, c'est trop

Michel Deville ("poéZies" - Le cherche midi éditeur, 1990)

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Le chat chinois

Cet après-midi
Un chat chinois prit
La portion de riz
D'un gros poussah gris
qui poussa des cris
Que l'on entendit
De Chine à Paris.

Le chat rit ravi
Du charivari.

Michel Deville ("poéZies" - Le cherche midi éditeur, 1990)

- Maurice Donnay -

Maurice Donnay (1859-1945) est un écrivain français, humoriste, poète, chansonnier du "Chat noir" (voir Alphonse Allais), et prolifique auteur de théâtre.

On connaît le début de ce poème d'Alfred de Vigny, "Le cor" :

J'aime le son du cor, le soir, au fond des bois,
Soit qu'il chante les pleurs de la biche aux abois,
Ou l'adieu du chasseur que l'écho faible accueille,
Et que le vent du nord porte de feuille en feuille.

Maurice Donnay s'en est inspiré pour une fable, jeux de mots à l'appui :

Le serpent et le cor de chasse

Un jour, un grand serpent, trouvant un cor de chasse,
Pénétra dans le pavillon
Et comme il n'avait pas beaucoup de place,
Dans l'instrument le reptile se tasse.
Mais, terrible punition !
Quand il voulut revoir le grand air et l'espace,
Et la vierge forêt au magique décor,
Il eut beau tenter maints efforts,
Il ne pouvait sortir du cor,
Le pauvre boa constrictor ;
Et pâle, il attendit la mort.
Moralité :

Dieu ! comme le boa est triste au fond du cor !

Maurice Donnay

- Paul Éluard -

Paul Éluard (1895-1952) est l'un des plus importants poètes du Surréalisme. Il a aussi participé au mouvement Dada.

Sur la maison du rire

Sur la maison du rire
Un oiseau rit dans ses ailes,
Le monde est si léger
Qu'il n'est plus à sa place
Et si gai
Qu'il ne lui manque rien.

Paul Éluard

  1. -- - - - - - - - - - - - - - - - -

  2. -

Dans Paris

Dans Paris il y a une rue;
Dans cette rue il y a une maison;
Dans cette maison il y a un escalier;
Dans cet escalier il y a une chambre;
Dans cette chambre il y a une table;



Sur cette table il y a un tapis;
Sur ce tapis il y a une cage;

Dans cette cage il y a un nid;
Dans ce nid il y a un œuf,
Dans cet œuf il y a un oiseau.

L'oiseau renversa l'œuf;
L'œuf renversa le nid;
Le nid renversa la cage;

La cage renversa le tapis;
Le tapis renversa la table;
La table renversa la chambre;
La chambre renversa l'escalier;
L'escalier renversa la maison;
La maison renversa la rue;
La rue renversa la ville de Paris.

Paul Éluard (livre "Dans Paris, il y a ..." Didier Jeunesse, 1998 et Rue du Monde, Collection  Petits Géants, 2001)


À la manière de "dans Paris il y a ...", le poème-gigogne :

À la manière de Paul Éluard, on construira un poème avec un enchaînement d'éléments, d'événements, à la manière d'emboîtements de poupées gigognes. Voyez ici des exemples de création poétique sur ce modèle : http://ecperchl.edres74.ac-grenoble.fr/spip.php?article28

Mais on privilégiera, pour le thème de l'humour, les situations les plus bizarres. On pourait imaginer par exemple ce genre de comptine en boucle (voir Marabout, bout d'ficelle dans le paragraphe des Jeux):

Dans ma maison il y a ma chambre / dans ma chambre il y a une armoire / dans cette armoire  il y a un arbre / dans cet arbre il y a une maison / Dans cette maison il y a ma chambre ...

- Pierre Ferran -

Pierre Ferran (1930-1989) était enseignant, poète et écrivain.

Le cinquième jour

Du haut d'un nuage,
Les mains rouges d'argile,
Dieu contemplait les animaux :
- "Je suis mécontent du zèbre,
Dit-il à saint Rémi
Qui tenait la liste,
Il ressemble trop au cheval,
Rayez-le !"

Pierre Ferran (recueil "Les Yeux", 1971)

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Comptine des canards sauvages

Trois pleins d'air
Deux pains durs
Un pin d'or
Sors !

Quatre à quatre
Cinq agates
Qui cahotent
Saute !

C'est la lutte
Pour la lotte
Écarlate
Tâte !

Huit tadornes
Neufs œufs durs
C'est-à-dire
Tire !

Dix milords
Dix mulards
Dix mulets
T'y es !

Pierre Ferran (anthologie de Jacques Charpentreau : "La nouvelle Guirlande de Julie" - éditions Ouvrières, 1976)

- Maurice Fombeure -

Maurice Fombeure (1906-1981) est un romancier et poète français.
Son recueil de poèmes le plus connu est "À dos d'oiseau", édité en 1942 aux éditions Gallimard et disponible en Poésie-Gallimard.

Chanson de la pluie

À dos de mule
À dos d'oiseau
À dos de libellule hulot
À dos de rat-mulot
À pas  de campanule
À bras de mélilot
S'en va la pluie à bulles
S'en va la pluie sur l'eau

Une pluie fil à fil
Qu'habille l'horizon
Et de fil en aiguille
Va jusqu'à la maison,
" Va jusqu'à la maison
Tu trouveras ma mère
Qu'est assise au tison
Qui recoud des linceuls
Ou qui tire au rouet
Toute  sa vie amère,
Demande-lui z'à boire
Z'à boire et à manger..."
Mais la pluie perd la mémoire
À force de voyager,

À force de voyager
Sur ses pattes de gouttes rondes
Faire le tour du monde.
À dos de mule
À dos d'oiseau
À dos de libellule hulot
À dos de rat-mulot
À pas de campanule
À bras de mélilot
S'en va la pluie à bulles
S'en va la pluie sur l'eau !

Maurice Fombeure ("À chat petit" - éditions Gallimard, 1967)

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Air de ronde

On dansa la ronde,
Mais le roi pleura.
Il pleurait sur une
Qui n’était pas là.

On chanta la messe,
Mais le roi pleura.
Il pleurait pour une
Qui n’était pas là

Au clair de la lune,
Le roi se tua,
Se tua pour une
Qui n’était pas là.

Oui, sous les fougères
J’ai vu tout cela,
Avec ma bergère
Qui n’était pas là.

Maurice Fombeure

- Xavier Forneret -

Xavier Forneret (1809-1884), contemporain de Victor Hugo, est un romancier ("Le diamant de l'herbe") et un poète non conformiste, adepte de l'humour noir.

Le texte qui suit, le plus connu de l'auteur, figure dans l'Anthologie de l'humour noir, d'André Breton, qui sans considérer Xavier Forneret comme un Surréaliste avant l'heure (trop excentrique, imprévisible), lui trouvait quand même un lien de parenté certain.

Un pauvre honteux

Il l'a tirée
De sa poche percée,
L'a mise sous ses yeux ;
Et l'a bien regardée
En disant : " Malheureux ! "

Il l'a soufflée
De sa bouche humectée ;
Il avait presque peur
D'une horrible pensée
Qui vint le prendre au cœur.

Il l'a mouillée
D'une larme gelée
Qui fondit par hasard ;
Sa chambre était trouée
Encor plus qu'un bazar.

Il l'a frottée
Ne l'a pas réchauffée
A peine il la sentait ;
Car, par le froid pincée,
Elle se retirait.

Il l'a pesée
Comme on pèse une idée,
En l'appuyant sur l'air.
Puis il l'a mesurée
Avec du fil de fer.

Il l'a touchée
De sa lèvre ridée. -
D'un frénétique effroi
Elle s'est écriée :
Adieu, embrasse-moi !

Il l'a baisée,
Et après l'a croisée
Sur l'horloge du corps,
Qui rendait, mal montée,
De mats et lourds accords.

Il l'a palpée
D'une main décidée
A la faire mourir. -
- Oui, c'est une bouchée
Dont on peut se nourrir.

Il l'a pliée,
Il l'a cassée,
Il l'a placée,
Il l'a coupée ;
Il l'a lavée,
Il l'a portée,
Il l'a grillée,
Il l'a mangée.

Quand il n'était pas grand on lui avait dit : Si tu as faim, mange une de tes mains.

Xavier Forneret (texte intitulé "Vapeur 13" dans le recueil "Vapeurs, ni vers ni prose", éditions Duverger, 1838)

- Georges Fourest -

Georges Fourest (1867-1945) est un poète français, auteur de deux recueils, "La Négresse blonde" (1909) et "Le Géranium ovipare" (1935), publiés aux éditions Messein, réédités en 1997 par José Corti et par d'autres éditeurs ensuite. Son humour est provocateur, rabelaisien, parodique.

Un sonnet, parodique du théâtre classique de Pierre Corneille :

Le Cid

Le palais de Gormaz, comte et gobernador
est en deuil; pour jamais dort couché sous la pierre
l'hidalgo dont le sang a rougi la rapière
de Rodrigue appelé le Cid Campeador.

Le soir tombe. Invoquant les deux saints Paul et Pierre
Chimène, en voiles noirs, s'accoude au mirador
et ses yeux dont les pleurs ont brûlé la paupière
regardent, sans rien voir, mourir le soleil d'or ...

Mais un éclair, soudain, fulgure en sa prunelle :
sur la plaza Rodrigue est debout devant elle !
Impassible et hautain, drapé dans sa capa,

le héros meurtrier à pas lents se promène :
"Dieu !" soupire à part soi la plaintive Chimène,
"qu'il est joli garçon l'assassin de Papa !"

Georges Fourest ("La Négresse blonde", 1909)

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Un poème peut-être accessible en cycle 3 :

Sardines à l’huile

Sardines à l’huile fine sans têtes et sans arêtes.
(Réclames des sardiniers, passim.)

Dans leur cercueil de fer-blanc
plein d’huile au puant relent
marinent décapités
ces petits corps argentés
pareils aux guillotinés
là-bas au champ des navets !
Elles ont vu les mers, les
côtes grises de Thulé,
sous les brumes argentées
la Mer du Nord enchantée...
Maintenant dans le fer-blanc
et l’huile au puant relent
de toxiques restaurants
les servent à leurs clients !
Mais loin derrière la nue
leur pauvre âmette ingénue
dit sa muette chanson
au Paradis-des-poissons,
une mer fraîche et lunaire
pâle comme un poitrinaire,
la Mer de Sérénité
aux longs reflets argentés
où durant l’éternité,
sans plus craindre jamais les
cormorans et les filets,
après leur mort nageront
tous les bons petits poissons !...

Sans voix, sans mains, sans genoux*
sardines, priez pour nous !...

*Tout ce qu’il faut pour prier. (Note de l’auteur)
Georges Fourest ("La Négresse blonde", 1909)

  1. -- -  - - - - - - - - - - - - - - - - -


Georges Fourest s'est essayé au poème-adresse. Voyez sa création, en forme d'acrostiche, au paragraphe Stéphane Mallarmé, plus loin, avec les poèmes-adresses et l'art postal.

- André Frédérique -

André Frédérique (1915-1957), est un poète d'humour sombre, disparu volontairement trop jeune. Ses recueils s'intitulent : Aigremorts (1947 - Gallimard),  Histoires blanches (1957 - Gallimard), Poésie sournoise (1957- Seghers).

Exercices de logique

Un homme qui serait mort mais qui ne serait pas né
Un homme qui naîtrait après sa mort
Un homme qui mourrait en naissant mais qui ne naîtrait pas en mourant
Un homme qui ne mourrait pas
Un homme qui naîtrait une fois sur deux
Un homme qui mourrait quelquefois
Un homme qui n'arrêterait pas de naître
Un homme qui ne finirait pas de mourir
Un homme qui naîtrait de sa belle mort
Un homme qui naîtrait au-dessous de la ceinture et qui mourrait au-dessus
Un homme qui ne serait ni né ni mort
Cet homme-là n'est pas encore né.

André Frédérique, ("Aigremorts" - 1947)


À la manière de "Exercices de logique"

La structure de ce  texte se prête plutôt facilement à la création poétique.
Un exemple à cette adresse :
http://www.af.spb.ru/bull3/TRAD.HTM

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Seconde classe

Dans le métro les gens sont tristes
derrière leurs lunettes
ceux qui ont des barbes mâchent le poil
ceux qui ont des journaux les dévorent
mais les vieilles femmes ont encore plus de peine
qui ne peuvent mâcher les barbes et
qui ne savent pas lire.

*découpage respecté
André Frédérique (
"Aigremorts" -1947 ; cité dans la revue "Poésie 1", n°22 de février 1972)

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La face

Il était laid avec ses deux bouches
Sous le nez sans cesse agitées
oui disait la droite non disait la gauche
et patati et patata
Il mit ses énormes moustaches
sur elles comme un drap*.

*majuscules et découpage respectés
André Frédérique (
"Aigremorts" -1947 ; cité dans la revue "Poésie 1", n°22 de février 1972)

 

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l’affiche officielle

et le projet en milieu scolaire à Mantes-la-Ville (Yvelines) >>

es textes proposés dans cette page ont déjà été mis en ligne en 2009 sur le blog lieucommun.canalblog.com où ils sont toujours :
PRINT POÈTES 2009 : L'HUMOUR des poètes - lieu commun
pour le PRINTEMPS DES POÈTES 2009, «EN RIRES»
La plupart visent une utilisation par les élèves d’ELEMENTAIRE, mais leur niveau va de la MATERNELLE au LYCÉE. Ce n’est pas indiqué faute de temps.